J’ai déjà parlé des pathologies qui m’ennuient.
Il y en a une par contre que j’adore : le coma hypoglycémique.
Le coma hypoglycémique est la martingale de la médecine générale.
C’est l’urgence qui vous permet, à tous les coups, de vous hisser au rang de Gregory House ou de David Copperfield.
Le 15 m’a appelé ce matin pour une mamie que je ne connaissais pas : diabétique sous insuline et en coma hypoglycémique.
De l’adrénaline à bon compte !
Je fonce jusqu’au village voisin. En plus des ambulanciers qui étaient déjà sur place, il y a toute la famille réunie autour du lit de Mme Hippo. Visages graves, affolement.
Il faut dire qu’elle a mauvaise mine, Mme Hippo. Couchée sur le côté, la bouche pendante, la respiration lourde, elle ne réagit plus du tout. Les ambulanciers ont sorti tout leur matériel : scope, tensiomètre, masque à oxygène, … « Le Glasgow est à 7 et le dextro à 0,28 ! » (*)
Je sors ma boite de seringues et une ampoule de sérum glucosé. Je regarde le bras de Mme Hippo et avise une veine qui a l’air assez accueillante – Ouf !
Je maintiens le bras d’une main, tiens la seringue de l’autre, attrape le capuchon de l’aiguille avec les dents (je sais, j’ai aussi mes petites coquetteries) et injecte mon ampoule de glucosé.
Le temps de ranger le garrot, et de mettre un pansement, je commence à appeler, penché au-dessus d’elle. « Ouh, ouh, Mme Hippo, vous êtes là ? »
Un grognement, une paupière qui s’ouvre.
Au bout de 10 secondes, le bras de Mme Hippo décolle du lit, monte lentement à la verticale, finit par attraper ma nuque. En même temps qu’il abaisse ma tête, celle de Mme Hippo se hisse tout doucement…
Et on entend un bisou claquer sur ma joue !
Relâchement, éclats de rire de la famille. « Ha ! Ha ! Il y a quoi dans vos seringues ??? » « Je crois qu’elle vous prend pour son petit-fils ! »
Je suis vraiment trop, trop fort.
… A tous les coups je vous dis !