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Pardon Alphonse

Pardon.

Pardon, Alphonse.

Il faut dire que, dans l’échelle de mon cœur, tu ne commençais pas avec beaucoup d’atouts en main.

Quand le Dr Moustache est parti à la retraite, tu es venu me trouver.

Avec un dossier aussi lacunaire que ton ordonnance était surchargée d’inutiles potions. Des symptômes compliqués et spécifiques de rien, je m’étais déjà crispé un peu.

Et puis avec ton gilet Lacoste et ta petite moustache fine, coupée au carré, qui surligne simplement ta lèvre et te donne cet air d’officier revêche, j’ai eu du mal à me sentir en empathie.

Et, bien sûr, il fallait que tu sois un prof à la retraite. Car s’il y a une corporation qui est à peine moins déplaisante à soigner que les professions médicales, ce sont quand même les enseignants.

Ah, ça, non, dès la première consultation, j’ai vraiment eu des difficultés à m’enthousiasmer.

Si, au moins, tu avais été un sale con, j’aurais su pourquoi je t’en voulais. Avec mon caractère de cochon, on aurait été au clash et ça aurait été réglé.

Mais, non, tu étais simplement pénible. Pénible comme peut l’être un dépressif dévoré d’angoisses. Pénible comme peut l’être un anxieux dont mon prédécesseur avait cultivé l’hypocondrie, comme on entretient sa vache à lait. Pénible comme peut l’être un prof qui sait beaucoup de choses sauf de se mettre en retrait lorsque ses émotions brouillent les pistes.

Il y a deux semaines, tu as fait venir le médecin de garde en soirée pour un malaise. Le médecin, c’était moi. Le malaise, c’était une attaque de panique qui t’avait submergé. Je n’avais déjà pas été très bon.

Et voilà que tu m’as appelé cet après-midi. Pour me voir en urgence. Parce que ça n’allait pas du tout. Moi, je faisais ma tournée hebdomadaire de visites à domicile, ça ne m’arrangeait pas.

Mais on s’est quand même vus et tu m’as expliqué. Tes insomnies, tes oppressions le soir, tes vertiges. L’ORL que tu as consulté deux fois en quinze jours et qui t’as prescrit du Pipidechat après avoir essayé du Perlimpimpim.

Tu m’as redemandé une nouvelle fois, s’il ne fallait pas revenir à l’antihypertenseur que t’avait arrêté le cardiologue puisque tu avais dix-sept de tension. Et qu’un autre médecin de garde, vu pendant le week-end, t’avait dit de le reprendre. Tu as ajouté que, de toute façon, c’était sûr que ce coup-ci tu l’avais ton cancer.

Je n’ai pas été très pro. Ou même carrément mauvais.

Je crois que je t’ai presque engueulé. Que ça n’avait aucun sens de se mesurer la tension comme ça, quinze fois par jour. Que je t’avais déjà dit de ranger ton satané tensiomètre ou de t’en débarrasser carrément. Que tu te comportais comme un poulet sans tête qui court dans toutes les directions, se cogne et trébuche. Que ton problème c’était la dépression et les angoisses. Que tu n’avais pas de cancer et qu’il fallait laisser un peu de temps aux traitements pour agir.

Et puis j’ai eu honte. Honte de m’en prendre à toi comme ça. Parce que tu souffres vraiment. Pas de ce que tu penses mais, oui, tu souffres. Honte de me rendre compte de la tentation que j’avais d’être encore plus désagréable. Dans l’espoir qu’avec de la chance tu partirais en claquant la porte, que tu te trouverais un autre médecin et que je serai débarrassé de toi.

Je me suis efforcé de me calmer, de t’expliquer. On a passé presque une heure ensemble à tâcher de te rassurer et de dégager une solution. Je ne suis pas sûr qu’on y soit arrivé. Je n’ai quand même pas dû être très bon mais j’ai essayé.
Mais qu’est-ce que j’ai du mal.

Je sais que tu n’es pas bien. Pour de vrai. Je sais que tu appelles au secours. Que, quand tu flippes à vingt-et-une heures, même si tu n’as objectivement rien de méchant, tu es réellement malade.

Je sais que tu mérites d’avoir un médecin, des soignants, qui s’occupent de toi. Comme les autres.

Je ne verrais même pas à qui te confier. Je les connais les confrères du secteur. Je suis à peu près sûr que la plupart n’hésitera pas à te rajouter calmant sur calmant, un scanner à une IRM, un spécialiste à un autre. Je ne crois pas que ce soit ce dont tu as besoin. Et puis, au nom de quoi, t’aurais-je envoyé ailleurs ?

Alors, puisque tu m’as choisi, je vais essayer de le faire mon boulot. Le mieux que je pourrai. Et j’espère que j’y arriverai. Que je parviendrai à t’offrir l’écoute et l’empathie que tu mérites, à garder la tête froide et à m’occuper de toi aussi bien que possible.

Alors que tu me pèses. Et que je ne t’aime pas.

P.S. Je dédicace ce billet à E. Merci de m’avoir poussé, peut-être sans le savoir, à mettre mes émotions en mots.

La relève

Thérèse est venue me faire ses adieux. Elle part vivre sur la Côte. Elle m’a raconté son petit appartement qui l’attend au troisième étage avec vue sur la mer.

Voilà trois ans que je l’ai connue. Un peu chic, bien maquillée mais avec un drôle de profil de ballon de rugby et un nez en forme de bille. Elle est venue me trouver quand son ancien médecin traitant était parti à la retraite.

En me remettant son dossier, elle avait pris les devants « Il était très gentil le Dr Panier mais, quand même, il exagère ! Il a noté « alcoolisme mondain » dans mon dossier !

– Ah bon ?

– Oui, tout de même, c’est très exagéré.

– Vous buvez un peu d’alcool quand même ?

– Oh ben oui, un peu. Comme tout le monde. Mais que du vin blanc et des kirs. Trois ou quatre par jour, ce n’est pas tellement n’est-ce pas ? Avant, je buvais parfois un peu plus avec des amis. Il faut bien profiter de la vie. Sinon, à quoi ça sert ? »

Thérèse prenait toujours rendez-vous en même temps que Jacky. Ils passaient l’un après l’autre.

J’ai fini par comprendre au bout de 6 mois qu’ils étaient voisins et que, Thérèse n’ayant pas le permis, elle profitait des consultations de Jacky pour venir à mon cabinet.

Jacky aussi il aime bien boire. Gentiment.

Bien bourru, bien sympa, il a le tutoiement facile : « Salut Borée ! Comment vas-tu ?

– Euh… bien M. Jacky, merci. Et vous ? »

En fait, c’est au bout d’un an et demi que j’ai appris qu’ils n’étaient pas seulement voisins mais, surtout, qu’ils avaient été mariés avant de divorcer. A l’amiable.

Et ce n’est rien de le dire.

Thérèse m’avait expliqué que, vraiment, elle n’en pouvait plus de vivre avec un homme, de lui faire à manger, de nettoyer les WC après son passage et, surtout, de son bazar. Mais que, sinon, elle l’aimait bien Jacky.

Comme c’est elle qui avait la maison, au moment du divorce, elle lui avait laissé la grange avec un peu de terrain. Ils l’avaient aménagée en petite maisonnette et Jacky avait pu transformer une partie en un grand atelier. « Comme ça il peut y mettre tout le bazar qu’il veut. »

Thérèse continuait à faire le repassage de Jacky « Vous pensez bien qu’il n’en serait pas capable ! » et le dimanche ils mangeaient ensemble. Pour les Fêtes, quand les enfants de l’un ou de l’autre venaient, ils se refaisaient les repas de famille comme avant. Dans la maison de Thérèse parce que la grange ça aurait été un peu petit.

Et quand Jacky faisait une gastro, c’est sur le canapé de Thérèse qu’il allait agoniser et se faire dorloter en attendant que j’arrive.

Thérèse est donc venue me faire ses adieux, me raconter le petit appartement avec vue sur la mer et le bonheur qu’elle aura à retrouver une vie sociale « Parce que, là, ça s’arrête à Jacky ma vie sociale ». Et en plus, elle sera à peine à 20 km des enfants de Jacky !

Mais surtout, elle m’a confié son soulagement de pouvoir partir avec l’esprit tranquille « Ça y est ! Il s’est enfin trouvé une femme ! Ah, ça, je suis contente. Et puis elle est épatante ! Ça m’aurait quand même embêtée de le laisser tout seul. Rien que pour le linge et la cuisine, je ne sais pas comment il aurait fait.

Mais, c’est bon, je peux partir tranquille, j’ai une relève ! »

***

Edition du 01/04/12

BlaguiBlago m’a fait l’amitié d’illustrer ce texte !

Etiquette

Oui, bon, voilà… On va me dire « Encore un billet pour se moquer de l’hôpital, c’est trop facile, genre : lui il se plante jamais… ».

Oui, ok, mais il fallait vraiment que je la raconte.

Je m’occupe d’Astérix.

Astérix, il a des moustaches comme… comme… ben, comme Astérix en fait. Et puis il est petit, râblé, bourru et il clope. Il n’a probablement pas été très loin après l’école primaire mais ça ne l’a pas empêché de bosser dur toute sa vie. Comme on dit : « il a une gueule ».

Je ne l’avais pas vu très souvent jusque là, pas le style à courir chez le médecin.

Il y a quelques mois, Astérix a eu un sale accident en travaillant. Du genre où il aurait pu y rester : quatre côtes pétées à gauches et huit à droite avec un bel hémopneumothorax bilatéral. (Pour les non-médecins, c’est ce qui arrive quand une côte casse, se déplace et va perforer un poumon. Du coup il y a de l’air et du sang qui viennent se mettre autour du poumon et celui-ci se ratatine et il respire beaucoup moins bien. Quand ça arrive d’un seul côté c’est pas super mais on a encore un poumon pour respirer. Quand ça arrive des deux côtés en même temps, c’est assez sportif.)

Astérix a été rapatrié dare-dare en réanimation : drains, oxygène, morphine.

Et le réanimateur de me faire une belle lettre pour me raconter en détails le séjour dans son service.

« le mardi, le patient présente un fébricule à 38°, mais dans un contexte de pré DT (*) probable avec trémulation, front luisant et hallucinations visuelles justifiant l’instauration d’une hyper-hydratation, d’une vitaminothérapie, par ailleurs débutée dès l’entrée, ainsi que d’un traitement psychotrope à base d’Haldol et Mépronizine.

(…)

Conclusion
Mr Astérix, âgé de 58 ans, sans antécédent notable, a présenté un traumatisme fermé du thorax, …
Pré DT probable chez un patient niant par ailleurs toute ingestion d’alcool. »

Après la réanimation, Astérix est parti en pneumologie. Et j’ai reçu la lettre du pneumologue (pourtant, c’est mon pneumologue préféré que je tutoie, qui est très bien avec les patients et très compétent) :

« Biologiquement, on a un bilan hépatique perturbé avec cytolyse hépatique : TGO à 138, TGP à 242, Gamma Gt à 698 (*).

Les perturbations hépatiques sont à mettre en relation avec un éthylisme antérieur. Nous avons supprimé les produits potentiellement hépato-toxiques, et notamment le Paracétamol. »

Et voilà, Astérix est rentré chez lui avec une belle étiquette qui, forcément, s’imposait vu sa tronche : non seulement il fume mais en plus c’est un alcoolique. Et un bon puisqu’il a fait son pré-delirium trémens et qu’il avait des Gamma GT au plafond !

Quand je suis passé le voir à la maison, je lui ai posé la question « Euh… dites voir, il y a les médecins de l’hôpital qui ont l’air de dire que vous buviez un peu trop là…

– Ah, non ! C’est pas vrai ça ! Je vous jure, je bois pas une goutte de vin et pas de bière ! Je fumais, ça c’est vrai, mais je bois jamais ! Je vous jure que c’est vrai, je vois pas pourquoi je vous le dirais pas. »

Et, de fait, je ne voyais pas bien pourquoi il ne me l’aurait pas dit. Et d’ailleurs, j’étais assez surpris : je n’avais jamais « senti » un problème d’alcool chez Astérix. Mais, bon, on sait ce que c’est, Dr House et la Faculté nous l’ont appris : le patient est menteur. Surtout s’il est alcoolique ou drogué.

« Bon, ben de toute façon il va falloir faire des prises de sang de contrôle pour surveiller le foie. Et puis, si vous êtes d’accord, on fera un dosage qui permet de voir s’il y a un problème d’alcool. Comme ça, on pourra le prouver aux médecins de l’hôpital. Et ça me permettra de te montrer que c’est pas la peine de me mentir, espèce d’alcoolo. »

Les CDT (*) me sont revenues blanches comme la neige à 0,5%. Et le bilan hépatique s’est gentiment amélioré pour finir de revenir dans les normes.

Les « perturbations hépatiques » n’étaient pas à mettre en relation avec un éthylisme antérieur mais avec le fait que le foie est, lui aussi, situé sous les côtes et qu’il avait également bien morflé dans l’aventure.

Quant au « pré-DT probable avec trémulation, front luisant et hallucinations visuelles », on peut se dire raisonnablement qu’être attaché dans un lit de réanimation avec des tuyaux et des bips partout, quand on a mal et que pour ça on a des perfusions de morphine à bonne dose, ce sont aussi d’excellentes raisons pour être dans cet état.

Au final, le patient qui « niait toute ingestion d’alcool » avait bien raison de le faire.

Et nous, médecins (moi compris puisque j’ai également douté), nous nous sommes bien fourré le doigt dans l’oeil jusqu’au cholédoque…

Raconté comme ça, ça pourrait rester une anecdote amusante mais en fait pas vraiment.

On voit très bien dans les courriers comment le réanimateur a une conviction intime mais qu’il prend tout de même la précaution de rajouter un « probable » qui laisse la place au doute. Et comment le pneumologue, de bonne foi, transforme ceci en fait acquis et sans nuance.

Connaissant le mode de fonctionnement habituel des médecins en général, et des hospitaliers en particulier, je sais que le risque est grand qu’à l’avenir, un interne ressorte les lettres d’hospitalisations et se contente de recopier, toujours de bonne foi, « Antécédents : éthylisme chronique ». Et comme ça, de lettre en lettre, une hypothèse diagnostique erronée pourra devenir une vérité médicale dont Astérix devra continuer à se justifier face à des interlocuteurs qui postuleront qu’il est toujours dans le déni…

C’est pourquoi, depuis, je précise dans toutes mes lettres le concernant « Je vous prie de bien vouloir noter que l’hypothèse d’alcoolisme qui avait été émise a clairement été infirmée par la suite. »

Il y a des étiquettes qui relèvent du tatouage.

(*) Quelques explications supplémentaires pour les non-habitués :
– PréDT : est l’abréviation de Pré-Delirium Tremens. Le Delirium Tremens est un syndrome qui survient lorsqu’un patient alcoolique est brutalement sevré. Il associe de la fièvre, une déshydratation, des tremblements, des délires avec hallucinations, souvent animalières (les fameux « éléphants roses »), parfois des convulsions. Au delà de l’aspect folklorique, c’est une pathologie grave, potentiellement mortelle en l’absence de traitements.
– Transaminases et Gamma GT : sont des enzymes qui existent dans le foie et qui sont présentes en petite quantité dans le sang. Lorsque leur taux augmente dans le sang, c’est le signe que des cellules du foie sont abimées. Les taux retrouvés initialement chez Astérix représentent 5 à 12 fois les taux normaux. C’est beaucoup.
– CDT : est l’abréviation anglaise de « Carboxy-Deficient Transferrin » (Transferrine carboxy-déficiente en bon français). Il s’agit d’un dosage sanguin qui permet de repérer de manière très spécifique, les consommations d’alcool chroniquement excessives. Elle reste normale en cas de consommation modérée régulière ou en cas de consommation excessive ponctuelle. Après l’arrêt complet de l’alcool, elle met plusieurs semaines à se normaliser.

La bonne mort

C’est un terme qui se discute. Presque un oxymore.

J’en ai déjà vu quelques unes des morts.

Juste un peu avant, ou bien pendant, ou bien juste un peu après… Des patients que je connaissais un peu, d’autres que j’avais accompagné, des que je n’avais jamais vu avant.

En réalité, la mort n’est jamais belle. Jamais, jamais, jamais.

Elle est juste un peu plus ou un peu moins laide, un peu plus ou un peu moins triste, un peu plus ou un peu moins douloureuse, un peu plus ou un peu moins salvatrice.

Ceux qui parlent d’une « belle mort », c’est qu’ils utilisent simplement une tournure de phrase convenue. Ou qu’ils n’en ont jamais vu en vrai.

Mais parfois, c’est exact, il y a des morts qui sont moins hideuses. Que, tant qu’à faire, on se souhaiterait à soi-même ou à ses proches.

Ça faisait huit ans que Pierrette se battait contre son cancer du sein. Pas le genre à laisser tomber. Elle avait bossé toute sa vie avec son mari. Elle était la tête, il était les bras. Ils avaient toujours monté des projets. Quand l’un était achevé, ils redémarraient autre chose.

Mais, parfois, on a beau se battre et gagner des batailles, on ne gagne pas la guerre.

Pierrette était suivie par un confrère du village voisin. C’était en été et il m’avait appelé pour me passer la main pendant ses vacances. Il m’avait prévenu que ça n’allait pas fort, qu’elle avait décidé d’arrêter la chimio, qui ne servait plus à rien, et qu’elle s’affaiblissait de plus en plus.

Elle était perfusée à la maison et avait tout ce qu’il fallait pour calmer les douleurs. Une des infirmières du coin habitait à 200 mètres de chez elle et connaissait bien la famille. Elle passait souvent.

La première semaine, je suis allé la voir tranquillement. Elle avait des nausées. On avait mis en place du Zophren.

Le mardi suivant, elle allait mieux. Presque plus de nausées et, malgré son ventre de pierre, « Les douleurs, ça va, elles sont bien calmées. »

Le week-end à venir, ça tombait bien, j’étais de garde. Ça l’avait rassurée.

Le samedi en fin de matinée, l’infirmière m’appelle. « Il y a un souci : Pierrette n’a plus uriné depuis hier midi. Je l’ai sondée et la vessie était vide. Elle est vraiment fatiguée et les nausées reviennent. »

Ça signifiait que les reins ne fonctionnaient plus, qu’elle s’était mise en insuffisance rénale terminale.

Dans un autre contexte, ça aurait été synonyme de dialyse en urgence. Là, ça voulait dire que c’était la fin.

Je suis venu aussitôt. J’ai examiné Pierrette avec l’infirmière à côté. Toute la famille était réunie et attendait pudiquement dans le salon.

Après l’avoir examinée tranquillement, je me suis assis au bord du lit. Je lui ai demandé si elle avait mal quelque part.

–          Non, ça, ça va.

–          Bon… Vous savez, je crois que vos reins ne vont pas redémarrer, ce n’est pas bon signe…

–          Je m’en doute, vous savez.

–          Qu’est-ce qu’on fait ?

–          Je suis fatiguée.

–          Vous en avez marre de vous battre…

–          Oui, … j’en ai marre.

–          … Je peux mettre des médicaments dans la perfusion qui vont vous permettre de vous endormir et de ne pas avoir mal du tout. Vous voulez qu’on fasse comme ça ?

–          Oui, on va faire comme ça.

Je suis allé dans le salon, il y avait le mari, les enfants, les petits-enfants. Je leur ai dit que ça allait être la fin et qu’on ne pouvait plus retarder l’échéance. Ils s’en doutaient bien eux aussi. Les yeux étaient un peu rouges mais tout le monde était calme.

Je ne sais plus si c’était la réalité ou un souvenir déformé, mais je garde l’image d’une ambiance où la tristesse et la douleur se mêlaient à une sorte de douce sérénité.

J’ai fait des ordonnances, envoyé le petit-fils à la pharmacie de garde et annoncé que je reviendrai une heure plus tard après avoir vu une autre urgence.

A mon retour, tout était là. On a préparé la nouvelle perfusion, ensemble avec l’infirmière. Avant de la brancher, je suis allé voir la famille « Quand on aura démarré la perfusion, elle risque de s’endormir assez vite. Vous pouvez encore aller la voir. »

Ils y sont allés. Se parler ? S’embrasser ? Ou peut-être seulement se tenir la main ?

Quand tout a été en place, j’ai fini par laisser l’infirmière avec Pierrette et son mari. Avant de partir, le fils m’a proposé un café. Je me suis assis avec ses sœurs et lui, et on a parlé un petit moment. De Pierrette et de sa vie, de la maison qu’ils avaient achetée au Maroc et des voyages qu’elle avait faits.

Cinq heures après, dans la soirée, l’infirmière m’appelait pour me dire que Pierrette était partie voir de l’autre côté. Les derniers moments avaient été un peu éprouvants pour tous à cause des râles que la scopolamine n’avait pas fait disparaître mais le passage s’était fait sans douleur.

Lorsque je suis venu faire le certificat, la maison était toujours aussi calme. Les larmes avait coulé mais on sentait surtout tout l’amour qu’il y avait dans cette famille. J’ai aidé l’infirmière à préparer Pierrette et je suis parti.

Quelques mois plus tard, le fils de Pierrette nous invitait, le confrère et moi, pour une balade à cheval pour nous remercier. Et l’an dernier, c’est son père qui s’est remarié avec une femme qui avait connu la même histoire que lui. Life goes on.

Quant à moi, bien des fois, je repense à cette journée. Ce n’est vraiment pas souvent que les conditions sont réunies pour qu’une fin de vie se passe ainsi, à la maison. Mais, ce jour là, vraiment, je crois qu’on s’était tous rapprochés de la meilleure manière dont on pouvait l’envisager. Ensemble.

Fan club

J’ai un fan club.

Ce sont les personnes âgées du village qui habitent autour du cabinet. Une bonne petite bande qui ont été parmi mes premiers patients.

Parmi les membres du club, il y a René, Gérard et Madeleine. Et surtout des femmes, veuves pour la plupart.

Une laitue par ci, des tomates par là, une boîte de foie gras ou quelques oeufs, on me gâte.

Il y a en particulier Germaine, Charlotte et Simone. C’est le trio de choc de mon fan club. Ma garde prétorienne.

Gentilles comme tout. Grands sourires, bras levés, je les croise souvent dehors. Parfois au café, parfois alignées sur le banc en face du cabinet. Elles sont presque toujours fourrées ensemble.

Et parfois, en consultation, il y en a une qui se lâche :

« Oh, vous savez, Germaine ! Cette grosse tourte… »

« J’étais avec Simone, vous ne lui direz rien, hein. Parce qu’alors… elle est gentille n’est-ce-pas… Mais qu’est-ce qu’elle cause ! »

J’adore !

Décalage

En écrivant le billet « Chacun cherche… », il m’est revenu une histoire concernant René qui nous avait bien amusés…

Parmi ses pérégrinations médicales, je reçois un jour la lettre d’un confrère Pneumologue du CHU. Après diverses considérations pneumologiques, ce charmant confrère conclut son courrier en me précisant « qu’il s’interroge sur les fonctions cognitives de M. René et qu’il serait peut-être souhaitable d’envisager un bilan plus poussé auprès de nos confrères gériatres ».

Bref, le Pneumologue se demande si René n’est pas en train de commencer une maladie d’Alzheimer.

« Ben ça… » me dis-je. Il est sûrement déprimé et un peu névrosé mais je n’ai jamais rien remarqué qui puisse me faire soupçonner une telle possibilité. Aurais-je manqué quelque chose ?

Quelques jours plus tard, je vois René en consultation et nous discutons de son passage au CHU qui l’a apparemment un peu ébranlé.

Il me raconte…

Avant la consultation en Pneumo, il devait aller faire un scanner. Ceci fait, la secrétaire de la radio lui remet les clichés et lui dit en substance « Voilà, prenez ça et emmenez-les avec vous pour aller voir le Pneumologue. Bonne journée. Au revoir. »

Et René s’est perdu. Dans le CHU. Au lieu de prendre l’ascenseur H, il a pris l’ascenseur G. Il est sorti au 7ème au lieu du 9ème. Après avoir tourné à gauche, être descendu de trois étages, remonté de un et pris le troisième couloir à droite, il a quand même fini par arriver en Pneumologie. Avec du retard. Il s’est gentiment excusé. « Je me suis égaré. »

Et puis, en arrivant devant le pneumologue, celui-ci a pris la jolie chemise cartonnée jaune que la secrétaire avait préparée, ajusté ses lunettes, sorti son stylo et, en vérifiant les informations, il a demandé à René

– Ah, tiens, il n’y a pas votre adresse, c’est quoi ?

– Eh bien, le Bourg.

– Oui mais vous avez bien une adresse, c’est laquelle ?

– Ben… le Bourg, je mets toujours « le Bourg ».

– M’enfin, vous habitez bien dans une rue, elle s’appelle comment ?

– Euh… je ne sais pas.

– Et votre numéro de rue, vous ne le savez pas non plus.

– Euh… non.

Et moi d’éclater de rire en imaginant la scène entre René et ce spécialiste apparemment très citadin.

Comme si le fait de se perdre dans les méandres d’un CHU était forcément un signe de désorientation spatiale !

Et comme si ne pas savoir son nom – et son numéro ! – de rue, c’était forcément qu’on l’avait oublié. Parce que, oui, oui, on a forcément un nom de rue dans son adresse. Tout le monde en a un.

Ben non. Quand on habite un patelin comme ici, les rues et les numéros, c’est tout juste bon pour le cadastre. Sur mes ordonnances, mon adresse c’est aussi « Le Bourg ».

Comme quoi, il n’y a pas besoin d’imaginer des situations très exotiques pour se rendre compte que le soignant peut être trompé par le décalage « culturel » qui peut exister entre sa propre vision et celle de son patient.

En tout cas, ça nous aura bien fait rigoler au moins, René et moi.

Edition du 30/08/11

L’amie Laurel m’a gratifié d’un dessin pour illustrer ce billet :

Glacé

Jacqueline était l’une de mes patientes préférées. Ancienne architecte, à l’époque où, pour une femme, elles ne devaient pas être nombreuses. 80 ans, encore vive, elle continuait à écrire des articles pour une revue professionnelle.

Un caractère de fer et une santé du même métal, je ne la voyais que de temps en temps, pour des bricoles. Elle n’avait aucun traitement de fond.

Jacqueline est venue me voir en octobre et j’ai détesté cette consultation.

Elle s’est assise en face de moi : elle était jaune comme un pissenlit. Je lui ai demandé depuis combien de temps.

– Une semaine environ, je ne l’ai pas remarqué, c’est ma femme de ménage qui est venue aujourd’hui et qui l’a vu.

– Vos selles sont normales ?

– Non, pas vraiment, elles sont décolorées.

– Vous avez mal quelque part ?

– Non, aucune douleur.

Pourquoi m’as-tu répondu ça !? Pourquoi ne m’as-tu pas dit que tu avais mal, là sous les côtes, à droite !? Au moins un peu… Que je puisse espérer que ce n’était qu’un bête calcul.

Je n’avais même plus besoin de t’examiner, je connaissais déjà la suite. Ça ne faisait que deux minutes que la consultation avait commencé mais, de te regarder et de te poser simplement ces deux questions, je savais déjà quel genre de saloperie te dévorait.

Toi, tu étais encore tranquille et sereine, attendant la suite. Moi, j’étais déjà glacé et paniqué, anticipant la fin.

Jacqueline est morte la semaine dernière.

Ligne rouge

Jeunes parents. Premier enfant mort 10 heures après être né. Prise en charge visiblement pas optimale. Drame. Mauvaise communication. Méfiance maximale vis-a-vis du milieu médical.

Ils étaient venus me voir avec leur petite fille. La deuxième. Et puis pour eux aussi. Le contact s’était noué sur le mode hard. Surtout qu’ils étaient assez branchés naturopathie. Jusqu’à un certain point, ça ne me posait pas de problème. Chaque décision devait être discutée, argumentée mais, en y allant doucement, on s’était petit à petit apprivoisés.

Ça faisait un petit moment que je ne les avais pas vus, tout allait bien. Je les revois pour une bricole. En ouvrant le dossier de la petite, j’ai une alerte automatique qui s’allume « rappel DTP ».

– Tiens ! Il va falloir faire le rappel du tétanos.

– Non, nous ne le ferons pas.

– Comment ça ?

– Nous en avons discuté avec mon mari, nous ne voulons plus faire aucun vaccin.

Et de m’expliquer toutes les horreurs qu’ils ont pu glaner sur l’internet au sujet de l’industrie pharmaceutique en général et des vaccins en particulier.

Et moi de commencer à exposer tout mon argumentaire pour patients rétifs aux vaccins (je n’y arrive pas trop mal en général). J’essaie de leur dire que, bon…, pour l’industrie je n’ai aucune tendresse non plus, que je m’en méfie, qu’ils savent très bien que je prescris globalement peu de médicaments et presque jamais les dernières nouveautés. Mais qu’il ne faut pas pour autant tout rejeter en bloc et que les vaccins, avec l’hygiène et les antibiotiques, sont quand même ce qui a révolutionné notre état de santé.

Je leur dis que même si je ne trouve pas ça très malin et que j’essaierai de les convaincre, s’ils ne veulent pas faire le ROR ni l’hépatite B, je ne me fâcherai pas avec eux. Que, pour ce qui les concernait eux-même, s’ils ne voulaient plus se faire vacciner, c’était idiot mais c’était leur droit.

Par contre pour un enfant. De un, c’est illégal. De deux, et surtout, c’est irresponsable parce que le tétanos, en vivant à la campagne, il n’y a aucun moyen autre que le vaccin d’écarter complètement le risque. Et que le tétanos, c’est une maladie mortelle.

« Je crois que nous devons nous mettre d’accord que nous ne sommes pas d’accord. » Me dit-elle.

En général, je garde à peu près mon calme pour gérer mes cancres mais là, je n’ai plus réussi à rester serein. Je n’ai pas hurlé mais j’étais en colère. Et du coup, probablement, plus du tout professionnel.

J’ai quand même examiné la gamine pour l’otite pour laquelle ils étaient venus. Rien de bien méchant.

Et je leur ai expliqué que, pour le coup, je ne pouvais pas « être d’accord de ne pas être d’accord », qu’en cas d’urgence je serai toujours là mais que, s’ils ne changeaient pas d’avis, il valait mieux qu’ils trouvent un autre médecin. Parce que, sinon, chaque consultation serait à l’avenir une épreuve de force, que je serai toujours en colère et qu’on ne ferait rien de bien ensemble.

J’ai fait l’ordonnance pour l’otite et ils sont partis.

Cette histoire m’a tourneboulé jusqu’au soir et, aujourd’hui encore, je ne sais pas ce que j’aurais dû faire.

Faire ce que j’ai fait en me disant qu’ils n’allaient visiblement pas changer et qu’on ne pourrait rien faire de valable ? Que, à choisir, je préférais ne plus les voir et qu’ils trouvent un confrère qui arriverait à se convaincre que ce n’était pas sa responsabilité à lui ? Quitte à les envoyer chez un charlatan en blouse blanche qui leur signera un certificat de complaisance ?

Ou bien réussir à trouver la sérénité nécessaire pour accepter de passer là-dessus en me disant qu’il fallait maintenir le lien thérapeutique et que, à la longue, j’arriverai à les convaincre ? Quitte à prendre le risque que la gamine fasse un jour un tétanos et que ce soit moi qui m’en sente responsable ?

Est-ce qu’on peut se permettre d’avoir des lignes rouges ?

Tempus fugit

J’ai revu Gérard et Madeleine. Ça ne va pas trop mal. Physiquement.

Gérard n’a pas un sommeil extraordinaire : il ronfle, il s’agite un peu, sa prostate marque les heures…

A côté, Madeleine veille et ne dort pas beaucoup. Elle guette la respiration, les mouvements, les ronflements de Gérard.

En fin de visite, elle m’entraîne dans la cave pour me dégoter un pot de confiture qu’elle a faite. Et, pour faire bonne mesure, un pot des rillettes concoctées par Gérard.

Elle me dit ses nuits blanches : « Que voulez-vous ? Je sais bien que ça arrivera, à nos âges… Mais vous imaginez ! Si un jour il meurt à côté de moi dans le lit ? Qu’est-ce que je vais faire ? »

Et moi, qu’est ce que je pouvais lui dire ? « Allons, allons, que racontez-vous là ! Vous vous faites des idées. » ?

Eh bien, non. Il a 91 ans, il est cardiaque et, objectivement, statistiquement, il risque de mourir bientôt. Demain ? Dans un mois ? L’an prochain ou dans 10 ans ? Qui sait ? Mais on est plus près de la fin que du début, ça c’est sûr.

J’ai essayé de lui dire, à Madeleine, qu’on n’en savait rien. Qu’il n’avait pas de maladie grave qui pouvait laisser prévoir que ça tournerait vinaigre bientôt. Qu’ils pouvaient encore être ensemble pendant des années et que ce serait bien dommage de se gâcher le temps restant en se faisant tout ce souci.

N’empêche.

Je sais bien ce qu’on raconte. Que la mort fait partie de la vie, que c’est comme ça, que ça ne sert à rien d’être triste, et tout le tintouin.

N’empêche.

J’en ai déjà fait des certificats de décès, vu des familles en larmes, essayé de consoler des veufs, des veuves, des enfants. J’ai appris à garder de la distance avec ça, à me protéger.

N’empêche.

N’empêche que je sais bien que malgré tout ce qu’on dit, quand on se rend compte qu’il ne reste plus grand chose dans le sablier, pour ses proches encore plus que pour soi-même. Eh bien, on a la trouille.

Et ce sont bien mes propres angoisses qui se sont soulevées quand Madeleine m’a dit les siennes.

Que pouvais-je lui répondre ?

Responsabilités partagées

A deux reprises, en discutant avec des confrères, je me suis dit que la « responsabilisation des patients » avait bon dos…

La première fois, c’était lors d’un de mes remplacements. Je prenais un café avec l’associé du médecin que je remplaçais. Il se lamentait d’une journée trop calme et me précisait qu’à moins de 15-20 patients sur la matinée, c’était ennuyeux à mourir.

Ses consultations duraient entre 10 et 15 minutes.

En fait, c’est à peine moins que la consultation moyenne chez un généraliste français : 16 minutes.

Bref, je lui demandais comment il arrivait à faire pour aller aussi vite, le temps d’interroger le patient, de l’examiner, de préparer l’ordonnance, de l’expliquer et, bien souvent, de prendre certains rendez-vous chez des spécialistes.

Et lui de me répondre « Ah mais, ça, je ne m’en occupe pas ! Concernant les rendez-vous, je laisse toujours faire le patient. C’est pour le RESPONSABILISER. »

Ben voyons…

Moi, je l’ai quand même un peu soupçonné que ce soit pour gagner du temps. Parce que, franchement, ceux qui savent ce que c’est que de prendre un rendez-vous chez un spécialiste, surtout si c’est à l’hôpital et surtout si c’est dans un CHU, savent combien ça peut être infernal. Alors quand c’est infernal pour nous qui maîtrisons à peu près les rouages de la machine, on imagine bien ce que ça peut donner pour un petit vieux un peu perdu…

*

Quant au deuxième épisode, il mériterait un billet à lui tout seul.

Il y a deux ans, j’ai fait la connaissance d’un couple de retraités qui revenaient au pays depuis leur émigration de la grande ville.

Lui, petit, rond. Et sourd. Elle, maigre, sèche comme un vieux quignon de pain. Et vociférante.

Je découvre donc leurs dossiers médicaux.

Elle avait déjà eu un bon suivi psy mais ne prenait plus aucun traitement. A côté de ça, elle avait été opérée d’un goitre et prenait du Levothyrox© pour compenser. Assez banal. Comme toute bonne patiente d’une grande ville, elle se faisait suivre depuis 10 ans par un endocrinologue pour équilibrer son traitement. Ce qu’un modeste généraliste est bien sûr à peine capable de faire. En rentrant dans les détails, je découvre qu’elle prenait 150µg en été et 200µg en hiver. Ah, ben déjà c’est moins banal, le traitement saisonnier.

Et puis surtout, je découvre que son super-spécialiste-endocrinologue-de-la-ville, ça fait 10 ans qu’il la maintient en hyperthyroïdie avec une TSH indosable. « Pour mieux la contrôler » qu’il disait apparemment.

Je le jure : j’ai passé presque deux heures sur trois consultations à négocier, à expliquer, que c’était n’importe quoi et qu’à ce rythme là on allait lui bousiller le coeur très vite. J’ai appelé deux endocrinologues différents, avec le haut-parleur, pour la convaincre. Et j’ai fini par y arriver. Elle a accepté de revenir à un traitement plus « normal ».

Deux mois plus tard, elle avait pris 5 kg et se trouvait énorme. Je lui ai dit que ce n’était pas surprenant, qu’on avait juste retrouvé une situation normale et que c’était avant qu’on l’avait artificiellement fait maigrir.

Encore deux mois et elle n’avait pas pris plus de poids sur ma balance mais elle se trouvait encore plus énormément énorme, me suppliant de revenir à son ancien traitement. Je suis resté ferme.

Encore deux mois et elle avait changé de médecin. Je l’ai appris par son mari que je vois toujours et qui a l’air de déguster.

Un jour que j’avais au téléphone le nouveau médecin traitant, ça a été plus fort que moi, je lui ai demandé :

– Tu l’as remise sous son ancien traitement, celui de l’endocrinologue ?

– Ben, oui, je lui ai dit que ce n’était pas bien mais elle me le demandait.

– Et tu as quand même conscience qu’elle n’est vraiment pas très nette sur le plan psychiatrique ?

– Oh oui, mais moi je pense que les patients doivent prendre leurs R-E-S-P-O-N-S-A-B-I-L-I-T-É-S. Ces gens-là, ils doivent aller au bout de leur démarche.

*

Eh bien cette histoire de « responsabilité des patients », on ne m’ôtera pas de l’idée que ce n’est parfois rien d’autre qu’une bonne excuse pour ne pas assumer les nôtres. De responsabilités.