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L’examen « à l’anglaise » – et autres mises au point gynécologiques

Je vous avais déjà raconté la première fois que j’avais fait un examen gynécologique en « position anglaise » (ou en « décubitus latéral ») en m’étant inspiré de ce qu’avait dit Martin Winckler dans Le Choeur des Femmes.

Je vous avais dit aussi que j’avais fini par me remettre à la position classique après quelques essais un peu lamentables.

Mais, comme annoncé, je suis allé passer une journée auprès d’un ami gynécologue qui, depuis qu’il a lui aussi lu ce livre, ne travaille pratiquement plus que de cette manière.

Merci à lui de m’avoir accueilli à ses côtés, et à ses patientes d’avoir accepté ma présence.

En fait, c’est super facile !

Je me suis donc décidé à faire le billet que j’aurais aimé trouver après avoir refermé Le Choeur des Femmes.

Plus précisément, ce billet a pour objet d’aborder trois choses différentes mais qui se rejoignent :

l’examen gynécologique en décubitus latéral

la pose de DIU selon la technique « directe »

l’utilisation (ou non) d’une pince de Pozzi.

 

***

L’examen gynécologique

en décubitus latéral

(« à l’anglaise »)

En réalité, la position que je vais décrire n’est pas exactement celle qu’évoque Martin Winckler.

Comme il l’avait expliqué, j’avais fait des essais en demandant à la patiente de se coucher sur le côté et en remontant les deux genoux vers le torse (en « chien de fusil »). Ce n’est pas forcément très pratique pour le médecin et ce n’est pas le plus confortable pour la patiente.

La position que je vous propose est donc la suivante : la patiente s’allonge sur le côté, la jambe qui est au contact de la table d’examen reste étendue et seule l’autre vient se replier (un peu plus haut que dans la PLS).

Cette position est plus stable, plus confortable pour la patiente et probablement moins gênante (la patiente a moins l’impression de nous « tendre les fesses ») que celle décrite dans Le Choeur des Femmes.

On obtient donc quelque chose dans ce style :

Pour le médecin, on est bien sûr un peu moins à l’aise que dans la position classique : il faut rester debout, sur le côté de la table d’examen, derrière les cuisses de la patiente. Et se pencher un peu.

Une table qui peut monter assez haut vous rendra les choses moins acrobatiques. Pensez également à la qualité de l’éclairage (une bonne frontale à LED achetée dans un magasin de sport fait très bien l’affaire).

Un médecin droitier sera probablement un peu plus à l’aise avec une patiente allongée sur le côté gauche et inversement. Mais je l’ai fait dans les deux sens et ce n’est pas très différent.

Idéalement, on peut recouvrir la partie inférieure du corps par un drap et n’écarter que ce qui est strictement nécessaire. La gestion du linge n’est cependant pas très facile en cabinet de ville et un morceau de drap d’examen en papier fait un honorable pis-aller.

D’une main, on va alors soulever la fesse et la grande lèvre supérieures pour dégager la vulve et introduire le spéculum avec l’autre main.

(Si vous avez du mal à visualiser la position du médecin, imaginez que vous entrebâillez un coffre et que vous vous penchez pour voir le trésor, tout en maintenant le couvercle de votre main gauche.)

Après avoir lubrifié le spéculum bien sûr mais, ça, vous le savez.

Ce qui avait rendu mes premiers essais assez lamentables, c’est que je cherchais à aller beaucoup trop vers l’arrière.

En fait, le spéculum doit venir s’appuyer sur la fourchette postérieure (qui est peu sensible) et se diriger, en gros, selon l’axe du corps.

Comme dans la position classique, on fait pivoter le spéculum à mi course avant d’ouvrir les valves.

(Sur ce dessin, le speculum est figuré dans la position où il est présenté à la vulve. En même temps qu’on le pousse vers l’intérieur, on fait pivoter le manche vers les fesses.)

Je ne sais pas si j’ai eu de la chance ou si c’est lié à la position mais je n’ai pas galéré une seule fois de la journée pour que le col vienne gentiment se caler entre mes deux lames de spéculum.

Voilà, c’est fait ! A ce stade, vous pouvez déjà faire un frottis.

***

La pose d’un DIU

par la méthode directe

Alors, déjà pour commencer, on va oublier le mot stérilet qui est un vilain archaïsme franco-français qui sert juste à faire peur aux femmes. Nous utiliserons donc l’acronyme DIU (Dispositif Intra-Utérin) qui n’est pas le plus facile à prononcer mais qui correspond à un usage international et qui est beaucoup plus neutre.

En France, et tout particulièrement dans le domaine de la gynécologie, on se dit souvent que si c’est compliqué et, si possible, douloureux, c’est sûrement mieux.

Donc, pour poser un DIU, je faisais comme j’avais appris consciencieusement : pose d’une Pozzi (j’y reviendrai), hystéromètre pour mesurer la profondeur utérine, réglage de la bague du DIU, je mets le tube inserteur (quand il n’y a pas un spasme à cause du passage de l’hystéromètre…), je recule le tube en maintenant le poussoir, je repousse le tout, je retire le poussoir, je retire le tube.

Et, bien souvent, je me plante sur une étape.

A la décharge des médecins, il faut bien reconnaître que c’est le protocole qui est décrit de cette manière dans les notices officielles des DIU.

J’avais déjà entendu parler de la technique de pose directe, également appelée, de manière plus martiale, « technique de la torpille » (chez BlueGyn, par exemple). A ma connaissance, elle est très peu connue et utilisée en France.

Et pourtant, elle est super simple.

Pour commencer, on va introduire un hystéromètre le plus fin possible. On ne le pousse pas à fond, le but n’est absolument pas de mesurer la profondeur utérine mais uniquement de déterminer l’axe du col.

Quand j’avais lu ça, ça me paraissait un peu mystérieux : ne vous laissez pas impressionner. Il suffit de pousser délicatement l’hystéromètre et de le lâcher une fois qu’il a passé le col pour voir la direction qu’il prend naturellement.

(Petit détail technique : je vous recommande fortement l’hystéromètre souple CH10 de CCD. Il est très effilé et, bizarrement, nettement plus fin que d’autres hystéromètres également notés « CH10 » : le CCD fait 2 mm à son bout et 3 mm au plus large, au lieu de 4 mm pour un « CH10 Prince Medical », par exemple. Ça ne paraît pas grand chose mais ça fait une section 40% plus petite.)

On ressort l’hystéromètre et on va alors présenter le DIU au niveau du col. On se fout totalement du réglage de la bague qui sert simplement à repérer l’axe des ailettes.

Il suffit ensuite de pousser le tube inserteur jusqu’à l’isthme du col en suivant la direction qu’on avait repérée.

Là aussi, avant de le faire sous le regard bienveillant de mon formateur, je me demandais si j’allais savoir repérer cet « isthme ».

En fait, c’est en gros quand on sent une légère résistance à environ 2 ou 3 cm de l’entrée du col. Pareil : ne vous laissez pas angoisser, d’autant plus que, avec cette technique, on n’est pas à 4 ou 5 mm près.

Une fois qu’on y est, il suffit de pousser à fond le poussoir, tranquillement mais fermement. Le DIU va alors se positionner tout seul dans la cavité utérine en ouvrant ses ailettes.

C’est tout doux. Il est presque impossible de se louper, sauf anomalie anatomique ou si l’on a mal repéré l’axe du col.

On ne doit normalement presque pas faire mal. Si c’est vraiment douloureux, c’est généralement qu’on n’a pas poussé le tube inserteur assez loin et que l’on essaie de libérer le DIU dans l’isthme du col. Il suffit alors généralement de le remettre dans l’inserteur et de réessayer.

Pour le fun, vous pouvez aller voir la petite animation qu’a faite BlueGyn.

Au fait, un petit scoop : l’efficacité du DIU reposant sur un mécanisme chimique (cuivre) ou hormonal (Mirena©), on se moque totalement de sa position. S’il est « de travers » ou « pas bien au fond », il marchera tout aussi bien !

Ceci dit, on a aussi le droit de rester raisonnable : si vous n’arrivez pas à poser le DIU chez une patiente en décubitus latéral, n’hésitez pas non plus à la faire repasser en position classique où l’on a tout de même des repères plus simple et une visibilité meilleure.

***

Pince de Pozzi

C’est un instrument que je ne montre jamais à mes patientes ! Il s’agit d’une pince très longue qui se termine par deux crocs qui permettent d’agripper fermement un organe. Elle a un côté très médiéval…

En gynécologie, elle sert généralement à attraper le col de l’utérus pour tirer dessus et redresser l’utérus lorsqu’il est coudé.

Le col de l’utérus est supposé être peu sensible. C’est plus ou moins vrai chez une femme qui a déjà accouché par voie basse. Ce n’est pas vrai du tout chez une nullipare.

Lorsque j’en posais, parfois en effet, la femme ne sentait rien. Parfois c’était tout de même assez sensible et ça générait un spasme du col qui m’empêchait de passer le DIU. C’est ce qui avait dû se produire chez Isabelle.

D’après Martin Winckler, l’utilisation d’une Pozzi n’est pas nécessaire pour poser un DIU.

Je dirais plutôt que, sauf aptitudes manuelles exceptionnelles, l’utilisation d’une Pozzi n’est généralement pas nécessaire.

Lors de ma journée, il a fallu l’utiliser une fois sur les sept poses de DIU.

Par contre, si on doit l’utiliser, il y a un seul endroit où l’on « a le droit » de la fixer parce que cette petite zone est, effectivement quasi-insensible.

C’est une petite zone ligamentaire située sur le versant externe de la « lèvre supérieure » du col. Si on a besoin d’utiliser une Pozzi pour tracter le col, il faut impérativement la positionner à cet endroit, parallèlement au bord du col.

(Sur le dessin, la patiente est, bien entendu, allongée sur le côté. La « lèvre supérieure » du col se trouve donc à droite. 😉 )

Mais, encore une fois, elle ne sera le plus souvent pas nécessaire.

***

Conclusion

On m’a déjà demandé s’il existait un registre des gynécologues ou des généralistes travaillant « à l’anglaise ». La réponse est non et, de toute manière, ces professionnels sont encore très rares.

Si vous êtes un médecin (ou une sage-femme) et que vous pratiquez des actes de gynécologie, j’espère que ce billet vous sera utile pour vous décider à franchir le pas. C’est beaucoup moins compliqué que ce que l’on imagine au premier abord.

Pour commencer, choisissez une patiente avec laquelle vous avez un bon contact et expliquez-lui le sens de la démarche. Elle sera certainement indulgente pour vos tâtonnements.

Si vous êtes une patiente, n’hésitez pas à imprimer ce texte (Ici en format PDF) et à le montrer à votre généraliste ou à votre gynécologue.

Peut-être  qu’il aura une réaction de rejet et qu’il refusera d’en discuter. Il fait peut-être partie de ces gynécologues qui vous demandent aussi de vous déshabiller intégralement pour faire un frottis et qui, globalement, n’ont pas un très grand respect pour leurs patientes. Voilà éventuellement l’occasion d’en changer.

Peut-être qu’il vous expliquera que, oui mais non, qu’il craint de ne pas réussir, qu’il est désolé mais qu’il préfère rester classique. Si vous vous sentez à l’aise et en confiance avec lui, gardez-le, ce n’est pas bien grave.

Mais peut-être aussi qu’il sera soulagé que vous ayez fait ce premier pas et qu’il sera heureux d’essayer de faire évoluer sa technique grâce à vous.

En médecine, nous sommes bien souvent amenés à pratiquer des gestes désagréables, douloureux ou qui heurtent la pudeur. Parfois, ces gestes sont indispensables.

Ces gestes incontournables, douloureux ou gênants, il y en a déjà bien assez. Il n’est vraiment pas nécessaire d’en rajouter quand on peut faire autrement.

***

Encore merci à Martin Winckler et à S. de se préoccuper du bien-être de leurs patientes et de partager leurs connaissances. Merci de m’avoir consacré du temps.
Un prêté pour un rendu : à mon tour de me faire passeur de savoir.
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Edition du 19 mars
Martin Winckler vient de publier ce texte/manifeste sur son blog.
Il m’a paru être un parfait complément au présent billet.

Inexium. Avec un ‘x’ comme multiplier.

Dans un commentaire du billet « Cher ami hospitalier », Erwan écrivait :

« Je voudrais comprendre pourquoi, sur quelles obscures recommandations, sur quelle étude en double aveugle sur échantillon représentatif, à quelle sourate du coran ils se réfèrent pour faire ressortir tous mes patients traités par IPP et hospitalisés munis d’une ordonnance d’inexium…
Aux chiottes les lanzo, omé et autres panto ! Au pinacle l’ésomé (certains prennent bizarrement la peine de le prescrire en DCI…hypocrisie ?).
Et moi pauvre capiste qui doit repasser derrière pour tout remettre en état et expliquer aux patients mon refus systématique (et antérieur au capi) de prescrire cette molécule.
On me dit que l’hôpital a un contrat avec le labo et que le seul IPP disponible chez eux est celui là.
Certes, je peux comprendre que dans un but louable d’économies, et par un habile mais obscur système d’échanges le pharmacien ait fait ce choix.
Mais pourquoi diable donc les médecins l’entérinent ils ?
Par flemme ?
Non…impossible… » (*)

Comme je l’ai déjà indiqué, il me semble que ce commentaire est en-deça de la réalité. Ce ne sont pas seulement les « patients traités par IPP » qui reviennent avec de l’Inexium, ce sont presque systématiquement TOUS les patients.

L’explication est en fait assez simple et pas si obscure que ça.

Le médicament à l’hôpital ne suit pas du tout les mêmes règles qu’en ville. Depuis 1987, son prix n’est plus réglementé (il existe simplement, depuis 2004, un encadrement pour les traitements « coûteux »). Le pharmacien hospitalier lance des appels d’offres pour acquérir les produits dont il a besoin au niveau de son établissement.

Généralement, il va référencer une, voire deux, substance par classe. Il n’est pas nécessaire d’avoir tous les IEC sous la main mais seulement un ou deux puisqu’ils sont assez largement interchangeables. Idem pour les macrolides, les ARA2 et… les IPP.

Le pharmacien hospitalier lance donc un appel d’offres du type « Qui me fait le meilleur prix pour 1 000 boîtes d’IPP pleine dose ??? »

M. Astrazeneca répond un truc du genre : « 1 000 boîtes ? Pas de problème ! Je vous offre 1 000 boîtes d’Inexium. Non, non, non, ne dites rien, ça me fait plaisir. C’est pour moi. Et puis, c’est Noël ! »

Le pharmacien hospitalier se dit alors quelque chose comme : « 1 000 boîtes gratuites ! Oo Chic alors, la bonne affaire que voilà ! Avec toutes ces économies, je vais peut-être pouvoir payer les trithérapies et les chimios qui me coûtent un max (et qui ne sont pas, elles, interchangeables). »

Le médecin de l’hôpital, lorsqu’il y a besoin d’un IPP note donc « Inexium » puisque c’est le seul qu’il a sous la main et que, en effet, c’est aussi efficace.

Lors de la sortie, c’est bien souvent l’interne qui rédige la prescription et qui va généralement recopier sur l’ordonnance le traitement qui était celui donné durant le séjour :

  • Parce que, en effet, ça peut être pénible et compliqué, de retrouver le traitement d’avant et que « c’est pareil ». Le terme de « flemme » qu’utilise Erwan me semble donc juste mais un poil excessif.
  • Parce que dans la logique d’un interne (et de beaucoup de médecins généralistes), le traitement donné lors de l’hospitalisation est forcément le meilleur possible, celui qu’on a soigneusement et laborieusement optimisé (et c’est en grande partie vrai) et qu’il est donc parfaitement raisonnable de le poursuivre lors de la sortie.

Comme beaucoup de généralistes n’osent pas modifier un traitement mis au point à l’hôpital par peur (« S’il arrive quelque chose et que j’ai changé le traitement, on me le mettra sur le dos. ») ou par manque de temps/de courage (changer une prescription hospitalière nécessite un vrai travail d’explication et de conviction), ils maintiennent l’Inexium. Pendant des années.

Et M. Astrazeneca, qui est bien plus malin que philanthrope, se dit qu’il a bien eu raison d’offrir ces 1 000 boîtes puisqu’elles vont finalement générer la vente de 10 000 autres boîtes en ville. Payées au prix fort.

Ceci marche aussi, par exemple, en remplaçant « Inexium » par « Coversyl » et « M. Astrazeneca » par « M. Servier ».

Pour moi, le vrai mystère est ailleurs. Je ne comprends pas pourquoi les patients hospitalisés sont presque systématiquement mis sous IPP. J’imagine qu’il doit y avoir une sorte de terreur de « l’ulcère de stress » qui me semble relever plus du loup-garou que d’une démarche scientifiquement validée (si quelqu’un connait des études, je suis preneur).

Alors, oui, c’est vraiment pénible mais il faut reconnaître qu’avec le fonctionnement actuel c’est assez imparable. Il nous reste surtout à espérer que les hospitaliers soient un peu plus vigilants sur la question de l’optimisation des coûts de leurs prescriptions (à qualité égale, autant prendre le moins cher) ce qui n’est pas du tout dans leur culture.

Surtout, ils devraient prendre l’habitude de se poser la question lors des sorties d’hospitalisation : « Bon… ce médicament qu’il avait durant son séjour à l’hôpital, est-il encore nécessaire à domicile ? »

Parce qu’au-delà de l’Inexium, énervant mais sans gravité, ça éviterait aussi quelques conneries avec les somnifères chez les patients âgés. Et, là, c’est vraiment un problème médical.

Quant aux généralistes, ils devraient être un peu plus confiants en eux-même : les prescriptions hospitalières ne sont pas forcément parole d’Evangile et on a le droit de les modifier si on a de bonnes raisons de le faire.

(*) Pour les non médecins : les IPP sont les Inhibiteurs de la Pompe à Proton. Il s’agit d’une famille de médicaments qui existe depuis une vingtaine d’années et qui a révolutionné la prise en charge de certains problèmes gastriques (ulcères, reflux gastrique, …) car ils sont remarquablement efficaces et globalement très bien tolérés.
Leur vrai nom se termine en ‘prazole’ : oméprazole, pantoprazole, rabéprazole, etc…
Pour contrecarrer la perte du brevet du Mopral© (oméprazole), les laboratoires Astra Zeneca nous ont sorti un coup de boneteau en 2000 (avec la bénédiction des autorités du médicament) l’Inexium© (ésoméprazole) qui n’est jamais rien d’autre qu’une variante chimique de l’oméprazole. Ceci mériterait un billet en soi.

Pauvres de nous

« Grossesse : évitez les antalgiques », « Le paracétamol, facteur de risque pour les fœtus », « Les antalgiques déconseillés pendant la grossesse ».

Voici quelques grands titres de la presse francophone de ces derniers jours. Tout en nuances.

A l’origine de ces articles, une étude parue dans la revue Human Reproduction et signée par des chercheurs danois, finlandais et français.

De quoi s’agit-il ?

Cette étude avait pour objectif d’étudier l’impact de la prise de médicaments antalgiques usuels (Paracétamol, Ibuprofène et Aspirine) sur la survenue d’une malformation affectant les nouveau-nés masculins : la cryptorchidie (Les testicules se forment dans l’abdomen des fœtus et descendent normalement au cours de la grossesse pour prendre leur place dans les bourses. La cryptorchidie, c’est quand un testicule, ou les deux, ne descend pas complètement).

Pour étudier ceci, les chercheurs ont combiné deux volets : une étude épidémiologique chez des femmes enceintes danoises (1 040 garçons examinés) et finlandaises (1 470) et une étude expérimentale sur des rats.

Il est important de noter que le volet humain correspond à une étude épidémiologique descriptive. Ce type d’étude permet d’établir une corrélation mais n’autorise en aucun cas à affirmer un lien de cause à effet. On peut uniquement le soupçonner.

Que démontre-t-elle ?

(pour ceux qui veulent zapper la partie aride, rendez-vous plus bas à « Mais, mais, mais »)

D’une part que l’administration de Paracétamol et d’Aspirine chez la rate entraîne un surcroît de cryptorchidie, d’autant plus que les doses administrées sont importantes.

D’autre part qu’il semble exister, non pas UN mais DES liens statistiques entre la prise d’antalgiques par les femmes enceintes et la survenue d’une cryptorchidie chez les garçons nouveau-nés.

Pourquoi ces réserves ?

Déjà parce que l’étude a choisi de ne retenir que 491 des 1 040 mères danoises. En effet, dans l’étude danoise, les mères étaient interrogées sur leur consommation médicamenteuse soit par un auto-questionnaire écrit qui demandait s’il y avait eu « des prises médicamenteuses », soit par un entretien téléphonique au cours duquel on leur demandait expressément si elles avaient pris des antalgiques, soit avec les deux méthodes combinées. Or 56% des mères interrogées par téléphone ont déclaré une prise d’antalgiques contre seulement 26% de celles ayant utilisé l’auto-questionnaire et pour lesquelles, vraisemblablement, la prise d’antalgiques banaux était négligeable et ne correspondait pas à « des prises médicamenteuses ».

Au final, les chercheurs ont choisi de ne retenir pour l’analyse que les femmes interrogées par téléphone, considérant leurs données comme plus fiables. L’argument se tient.

Sauf que, dans une étude scientifique rigoureuse, exclure ainsi a posteriori plus de la moitié d’un échantillon, ça ne se fait pas. Si cette exclusion répond à un motif légitime, ce qui est le cas, c’est au minimum que l’étude a été mal conçue et planifiée et ça plombe sérieusement l’intérêt des résultats.

Par ailleurs, une grande spécialité des chercheurs et des statisticiens, c’est de découper leurs études en petits morceaux. Ce n’est pas illégitime et ça peut apporter des renseignements intéressants pour peu que, du coup, on ne fasse pas dire aux conclusions plus que ce qu’elles méritent.

En l’occurrence, un lien statistiquement significatif a été établi dans certaines comparaisons du groupe danois. Mais sur les 30 calculs statistiques publiés, 20 ne montrent pas de différence « statistiquement significative » (ce qui veut dire, conventionnellement, qu’il y a plus de 5 % de chances que le seul hasard explique les différences observées) simplement, parfois, des « tendances ».

En particulier, il n’y a pas de lien statistiquement significatif :

–          dans aucune des comparaisons du groupe finlandais

–          pour le paracétamol, sauf lorsqu’il est pris durant plus de deux semaines au total

Visiblement, le risque concerne essentiellement l’association de plusieurs antalgiques, l’aspirine et l’ibuprofène et la prise d’antalgiques durant plus de deux semaines au total.

L’article conclut assez sobrement et simplement par « L’ensemble de ces résultats tend vers un scénario dans lequel l’utilisation des antalgiques a un effet possible sur le développement fœtal avec des implications pour la future capacité reproductive. C’est pourquoi des explorations complémentaires sont absolument nécessaires (…) ».

OK, jusque là, pas trop de soucis. C’est une étude intéressante, pas tout à fait exempte de reproches méthodologiques, mais qui présente l’avantage de combiner un volet épidémiologique et un volet expérimental apportant des arguments physiopathologiques.

MAIS, MAIS, MAIS…

Une autre étude a été publiée au même moment dans une revue non moins prestigieuse, signée par des chercheurs non moins éminents.

Cette recherche a étudié, chez 47 400 garçons danois nouveau-nés (excusez du peu), le lien entre antalgiques et cryptorchidie. Oui, vous avez compris, c’est pratiquement la même étude, faite dans le même pays. Le Danemark ayant la plus forte incidence mondiale de cryptorchidie, on comprend qu’ils s’y intéressent.

La conclusion ? Aucun lien statistiquement significatif n’a été établi avec la prise d’aspirine ou d’ibuprofène. Le seul lien établi a été l’augmentation modérée (33%) du risque en cas de prise de paracétamol, en particulier pour des durées supérieures à 4 semaines.

Bref, c’est le bordel : les deux études se contredisent assez largement.

Décidément, la science c’est compliqué et les chercheurs ont parfois bien du mal à se mettre d’accord entre eux.

On pourra remarquer que cette seconde étude n’a été reprise par aucun média grand public. Peut-être aussi ces chercheurs avaient-ils moins bien soigné leur communication

Que penser de tout ça ?

Il existe vraisemblablement un lien modéré entre la prescription d’antalgiques et l’apparition de cryptorchidies. Cette augmentation du risque ne semble vraiment sensible que pour des doses assez importantes, des durées prolongées et en cas d’association de plusieurs antalgiques.

Il faut, en effet, des études complémentaires pour préciser les choses et il n’est peut-être pas inutile de rappeler que la prise d’un médicament n’est jamais totalement anodine, et en particulier chez la femme enceinte.

Pas plus que d’autres choses au demeurant puisque, parmi les facteurs de risques démontrés de la cryptorchidie, on trouve : le régime végétarien (pas de bol pour les « naturopathes » anti-médicaments), la supplémentation en fer (qui est quand même préférable à une bonne anémie), l’exposition aux pesticides (risque multiplié par 1,7 chez les mères travaillant dans le jardinage) ou aux phtalates.

Par ailleurs, une cryptorchidie ce n’est pas super génial mais ce n’est pas mortel non plus. Ça se diagnostique très simplement en examinant le nouveau-né et ça se corrige par une intervention chirurgicale. Si celle-ci est réalisée suffisamment tôt après la naissance, il n’y a généralement pas de conséquences à long terme.

En tout cas, rien ne justifie d’avoir ainsi affolé la population et en particulier les femmes enceintes ou susceptibles de l’être. Rien ne méritait que l’on mette à la une des journaux des titres pareils. Rien n’autorisait à dramatiser les choses en rappelant dans ces articles que la cryptorchidie est un « facteur d’infertilité voire de cancer du testicule ».

Comme s’il fallait les traumatiser encore davantage les femmes enceintes. Comme si on ne leur expliquait pas déjà que tout est dangereux. Comme si le moindre écart au dogme n’était pas déjà le témoin de leur totale irresponsabilité.

Et encore ! Les Français ont échappé aux déclarations aussi gratuites que fracassantes de l’un des auteurs danois de l’étude, largement relayé par la presse anglophone, affirmant que « les antalgiques constituent de loin la principale source d’exposition aux perturbateurs endocriniens chez les femmes enceintes (…) Un seul comprimé de paracétamol constitue un potentiel de perturbation endocrinienne plus important que l’exposition combinée aux dix perturbateurs environnementaux connus durant toute la grossesse. Un seul comprimé va en fait plus que doubler l’exposition d’une grossesse aux perturbateurs endocriniens. » (!!!).

Alors, moi je propose que l’on prenne ces « journalistes santé » qui se contentent de recracher des communiqués de presse pour faire du sensationnel, infoutus qu’ils sont de chercher l’information à la source et de la critiquer avec un peu de distance.

Et puis qu’on prenne les chercheurs qui confondent diffusion du savoir et médiatisation de leur gloire. Qui choisissent d’affoler les médias pour se faire mousser et pour griller le scoop de l’équipe concurrente. Et qui se foutent totalement des conséquences de leur vanité.

Qu’on prenne donc ces pseudo-« journalistes santé » et puis qu’on les pende avec les tripes de ces chercheurs. Haut et court.

Parce que ce cher chercheur danois, je trouve quand même qu’il ne manque pas d’air. Après avoir mis le feu, il nous explique que, désolé, mais il n’est pas pompier : « Les femmes pourraient désirer diminuer leur consommation d’antalgiques durant la grossesse. (Mais oui, crétin, les antalgiques on les prend pour le fun) Cependant, en tant que biologistes, ce n’est pas de notre ressort de conseiller les femmes à ce sujet. Nous recommandons aux femmes enceintes de prendre l’avis de leur médecin avant d’utiliser des antalgiques. »

Ah ça c’est sûr, je sens qu’on n’a pas fini de ramer entre les explications complexes, la trouille du procès et la nécessité de soulager nos patientes.

Les psychiatres ont de beaux jours devant eux ! « Mon fils a des problèmes de fertilité. C’est de ma faute ! Je me rappelle que pendant ma grossesse, j’avais pris une fois ou deux du Paracétamol pour ces foutues migraines. Je m’en veux tellement… »

Parce qu’il faudra quand même me dire ce que qu’on pourra prescrire sereinement à une femme enceinte qui a 40° de fièvre. Vu que la fièvre elle-même est tératogène. « Vous préférez la spina bifida ou la cryptorchidie ? Et puis signez moi, s’il-vous-plaît, ce papier qui atteste que je vous ai bien informé des risques. Voilà, au-revoir et bon courage. Mais ne stressez pas trop quand même ! »

En même temps, elles ne pourront pas dire qu’elles n’étaient pas prévenues…

« L’Eternel dit à la femme : J’augmenterai la souffrance de tes grossesses, tu enfanteras avec douleur, et tes désirs se porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi. »

Genèse 3,16

***

Post-scriptum (édition le 14/11 19:00) Dans le prolongement de ce billet, pour ceux qui veulent en savoir plus sur ce qu’il convient de faire de l’étude publiée dans Human Reproduction, Openblueeyes a publié un billet à la fois complet et limpide.

Etiquette

Oui, bon, voilà… On va me dire « Encore un billet pour se moquer de l’hôpital, c’est trop facile, genre : lui il se plante jamais… ».

Oui, ok, mais il fallait vraiment que je la raconte.

Je m’occupe d’Astérix.

Astérix, il a des moustaches comme… comme… ben, comme Astérix en fait. Et puis il est petit, râblé, bourru et il clope. Il n’a probablement pas été très loin après l’école primaire mais ça ne l’a pas empêché de bosser dur toute sa vie. Comme on dit : « il a une gueule ».

Je ne l’avais pas vu très souvent jusque là, pas le style à courir chez le médecin.

Il y a quelques mois, Astérix a eu un sale accident en travaillant. Du genre où il aurait pu y rester : quatre côtes pétées à gauches et huit à droite avec un bel hémopneumothorax bilatéral. (Pour les non-médecins, c’est ce qui arrive quand une côte casse, se déplace et va perforer un poumon. Du coup il y a de l’air et du sang qui viennent se mettre autour du poumon et celui-ci se ratatine et il respire beaucoup moins bien. Quand ça arrive d’un seul côté c’est pas super mais on a encore un poumon pour respirer. Quand ça arrive des deux côtés en même temps, c’est assez sportif.)

Astérix a été rapatrié dare-dare en réanimation : drains, oxygène, morphine.

Et le réanimateur de me faire une belle lettre pour me raconter en détails le séjour dans son service.

« le mardi, le patient présente un fébricule à 38°, mais dans un contexte de pré DT (*) probable avec trémulation, front luisant et hallucinations visuelles justifiant l’instauration d’une hyper-hydratation, d’une vitaminothérapie, par ailleurs débutée dès l’entrée, ainsi que d’un traitement psychotrope à base d’Haldol et Mépronizine.

(…)

Conclusion
Mr Astérix, âgé de 58 ans, sans antécédent notable, a présenté un traumatisme fermé du thorax, …
Pré DT probable chez un patient niant par ailleurs toute ingestion d’alcool. »

Après la réanimation, Astérix est parti en pneumologie. Et j’ai reçu la lettre du pneumologue (pourtant, c’est mon pneumologue préféré que je tutoie, qui est très bien avec les patients et très compétent) :

« Biologiquement, on a un bilan hépatique perturbé avec cytolyse hépatique : TGO à 138, TGP à 242, Gamma Gt à 698 (*).

Les perturbations hépatiques sont à mettre en relation avec un éthylisme antérieur. Nous avons supprimé les produits potentiellement hépato-toxiques, et notamment le Paracétamol. »

Et voilà, Astérix est rentré chez lui avec une belle étiquette qui, forcément, s’imposait vu sa tronche : non seulement il fume mais en plus c’est un alcoolique. Et un bon puisqu’il a fait son pré-delirium trémens et qu’il avait des Gamma GT au plafond !

Quand je suis passé le voir à la maison, je lui ai posé la question « Euh… dites voir, il y a les médecins de l’hôpital qui ont l’air de dire que vous buviez un peu trop là…

– Ah, non ! C’est pas vrai ça ! Je vous jure, je bois pas une goutte de vin et pas de bière ! Je fumais, ça c’est vrai, mais je bois jamais ! Je vous jure que c’est vrai, je vois pas pourquoi je vous le dirais pas. »

Et, de fait, je ne voyais pas bien pourquoi il ne me l’aurait pas dit. Et d’ailleurs, j’étais assez surpris : je n’avais jamais « senti » un problème d’alcool chez Astérix. Mais, bon, on sait ce que c’est, Dr House et la Faculté nous l’ont appris : le patient est menteur. Surtout s’il est alcoolique ou drogué.

« Bon, ben de toute façon il va falloir faire des prises de sang de contrôle pour surveiller le foie. Et puis, si vous êtes d’accord, on fera un dosage qui permet de voir s’il y a un problème d’alcool. Comme ça, on pourra le prouver aux médecins de l’hôpital. Et ça me permettra de te montrer que c’est pas la peine de me mentir, espèce d’alcoolo. »

Les CDT (*) me sont revenues blanches comme la neige à 0,5%. Et le bilan hépatique s’est gentiment amélioré pour finir de revenir dans les normes.

Les « perturbations hépatiques » n’étaient pas à mettre en relation avec un éthylisme antérieur mais avec le fait que le foie est, lui aussi, situé sous les côtes et qu’il avait également bien morflé dans l’aventure.

Quant au « pré-DT probable avec trémulation, front luisant et hallucinations visuelles », on peut se dire raisonnablement qu’être attaché dans un lit de réanimation avec des tuyaux et des bips partout, quand on a mal et que pour ça on a des perfusions de morphine à bonne dose, ce sont aussi d’excellentes raisons pour être dans cet état.

Au final, le patient qui « niait toute ingestion d’alcool » avait bien raison de le faire.

Et nous, médecins (moi compris puisque j’ai également douté), nous nous sommes bien fourré le doigt dans l’oeil jusqu’au cholédoque…

Raconté comme ça, ça pourrait rester une anecdote amusante mais en fait pas vraiment.

On voit très bien dans les courriers comment le réanimateur a une conviction intime mais qu’il prend tout de même la précaution de rajouter un « probable » qui laisse la place au doute. Et comment le pneumologue, de bonne foi, transforme ceci en fait acquis et sans nuance.

Connaissant le mode de fonctionnement habituel des médecins en général, et des hospitaliers en particulier, je sais que le risque est grand qu’à l’avenir, un interne ressorte les lettres d’hospitalisations et se contente de recopier, toujours de bonne foi, « Antécédents : éthylisme chronique ». Et comme ça, de lettre en lettre, une hypothèse diagnostique erronée pourra devenir une vérité médicale dont Astérix devra continuer à se justifier face à des interlocuteurs qui postuleront qu’il est toujours dans le déni…

C’est pourquoi, depuis, je précise dans toutes mes lettres le concernant « Je vous prie de bien vouloir noter que l’hypothèse d’alcoolisme qui avait été émise a clairement été infirmée par la suite. »

Il y a des étiquettes qui relèvent du tatouage.

(*) Quelques explications supplémentaires pour les non-habitués :
– PréDT : est l’abréviation de Pré-Delirium Tremens. Le Delirium Tremens est un syndrome qui survient lorsqu’un patient alcoolique est brutalement sevré. Il associe de la fièvre, une déshydratation, des tremblements, des délires avec hallucinations, souvent animalières (les fameux « éléphants roses »), parfois des convulsions. Au delà de l’aspect folklorique, c’est une pathologie grave, potentiellement mortelle en l’absence de traitements.
– Transaminases et Gamma GT : sont des enzymes qui existent dans le foie et qui sont présentes en petite quantité dans le sang. Lorsque leur taux augmente dans le sang, c’est le signe que des cellules du foie sont abimées. Les taux retrouvés initialement chez Astérix représentent 5 à 12 fois les taux normaux. C’est beaucoup.
– CDT : est l’abréviation anglaise de « Carboxy-Deficient Transferrin » (Transferrine carboxy-déficiente en bon français). Il s’agit d’un dosage sanguin qui permet de repérer de manière très spécifique, les consommations d’alcool chroniquement excessives. Elle reste normale en cas de consommation modérée régulière ou en cas de consommation excessive ponctuelle. Après l’arrêt complet de l’alcool, elle met plusieurs semaines à se normaliser.

Des dangers d’être borgne

L’histoire de Bob illustre bien une des difficultés du métier. Le médecin est parfois un « borgne dangereux ».

Il ne faut pas trop le blâmer car, dans cette attitude, il est largement poussé par ses patients, par les médias, par les séries télés, par l’ambiance générale.

Qu’est ce qu’être un « borgne dangereux » ?

C’est, lorsque deux options existent, n’en considérer qu’une. Ou, plus exactement, ne considérer que les avantages de l’une et que les inconvénients de l’autre. Le risque est alors, en manipulant cette balance faussée, de faire le mauvais choix. Pour de mauvaises raisons.

Le dépistage des cancers est un bon exemple de cette attitude.

On peut reprendre l’exemple du cancer de la prostate et des PSA.

Le numéro de juin de « Médecine » a fait un point très complet à ce sujet. Pour faire simple, les études nous indiquent pour la tranche d’âge 55-69 ans :

– En dépistant 1 500 hommes, on va détecter et traiter 50 cancers.

– Malheureusement, malgré les traitements, certains hommes vont quand même décéder de ce cancer. On va au final éviter 1 (et un seul) décès par cancer de la prostate en comparaison à 1 500 hommes qui ne se seraient pas fait dépister.

– Sur les 50 patients opérés, 25 patients resteront impuissants et 12 incontinents.

– MAIS, sur les 50 cancers traités, 25 n’auraient jamais fait parler d’eux.

– Au final, pour éviter le décès par cancer de la prostate chez un homme, on provoque une impuissance chez 12 hommes et une incontinence chez 6 hommes qui n’auraient jamais eu de problèmes sans le dépistage.

Mettre ces deux conséquences en balance est donc éminemment une affaire de choix personnel qu’il est impossible de ramener à un choix strictement objectif. Il nous appartient donc de présenter honnêtement ces deux alternatives au patient qui est en face de nous et l’aider à faire son choix, sans le biaiser avec des données incomplètes.

Le dépistage des cancers du sein peut poser le même type de problèmes.

Il y a deux ans de ça, j’ai pris en charge une dame de 84 ans dont le précédent médecin partait à la retraite. C’était une petite dame toute gentille qui vivait seule chez elle et qui était en fauteuil roulant en raison d’une vieille amputation d’une jambe. Trois mois plus tôt, elle avait vu le gynécologue qui l’avait opérée 6 avant d’un cancer de l’utérus, « pour le suivi ». Ce triple crétin n’avait rien trouvé de mieux à faire que de lui pratiquer une « mammographie de dépistage ». A 84 ans ? Ça ne correspond à aucune recommandation ni au moindre bon sens.

Bien sûr, on lui a trouvé une petite tumeur dans un sein. Bien sûr, on l’a opérée et on l’a fait « bénéficier » de 20 séances de radiothérapie. Déplacement en ambulance allongée, une heure de route aller, autant au retour. Heureusement, ça ne s’est pas trop mal passé et elle a fini ses séances cahin-caha.

Quant à moi, j’ai débarqué quand les séances de radiothérapie avaient déjà démarré. Trop tard pour arrêter le train qui était lancé, j’ai un peu lâchement fermé ma gueule.

Et bien sûr, il ne lui serait pas venu à l’idée, ni à elle, ni à sa famille, de faire le reproche à cet idiot de gynécologue de l’avoir emmerdée et inquiétée pour une tumeur qui, à son âge, avait toutes les chances de ne jamais lui poser de problème. Au contraire, trop contente qu’il l’ait ainsi « sauvée du crabe ».

Par contre, si, par malchance, une de mes patientes de 90 ans finit par avoir un cancer du sein qui devient symptomatique, il pourrait bien y avoir un confrère pour lui dire (sans aucune preuve scientifique) « Mais, ma pauvre dame, si le Dr Borée vous avait fait faire une mammographie l’an dernier, j’aurais pu faire quelque chose à temps. Mais là… »

Pas facile d’encaisser ça, même quand on sait qu’on a raison, qu’on a respecté les recommandations et que ce sont des recommandations solides.

C’est d’ailleurs un aspect qui est parfaitement mis en avant dans la petite vidéo de Dominique Dupagne que Fabinou avait déjà indiquée dans les commentaires de mon précédent billet.

Dans le même style, forcément, jamais un patient ne viendra me dire « Merci Doc ! Grâce à vos traitements contre mon diabète, mon cholestérol et mon hypertension, je n’ai pas fait d’infarctus l’an dernier. »

Mais s’il y en a un qui a un effet indésirable grave d’un médicament, ça, on le saura. Et si ce n’est pas le patient qui vient nous le reprocher, il est bien possible qu’on se le reproche soi-même. Même si on a suivi les recommandations officielles et qu’on a objectivement bien fait.

Et là où ça devient dangereux, c’est qu’on risque alors de perdre notre sang froid et de ne plus oser prescrire des médicaments pourtant utiles. Et tant pis si on augmente le risque des autres patients de faire des complications cardio-vasculaires. Si une telle complication survient ce sera « la faute à pas de chance ».

Dit d’une autre manière, on pourra préférer un grand risque « statistique » (l’augmentation du risque d’avoir des évènements cardio-vasculaires gaves) qu’un petit risque « certain » (les effets indésirables de nos médicaments).

Cette tentation du « borgne dangereux » nous y sommes tous soumis. Car personne ne peut prétendre échapper totalement à sa part d’irrationalité.

Pour autant, il faut essayer d’en avoir conscience pour s’en éloigner au maximum. Et mieux vaut se blinder des connaissances les plus solides pour toujours nous ramener vers la rationalité quand nos émotions et nos blessures d’amour-propre pourraient nous en éloigner.

Car les risques, même s’ils n’en sont que rarement conscients, ce sont nos patients qui les prennent.

Le vent du boulet

A chaque fois que que je m’apprête à écrire « PSA » sur une ordonnance de biologie, je pense à la plage de Jaddo et au petit baigneur que j’ai en face.

Les plus récentes études ont clarifié les choses et, à présent, je recommande généralement à mes patients de ne pas le faire. En tout cas, je leur présente les données dont on dispose et je les laisse choisir. Le plus souvent, ils me répondent « Ah ben, je comprends mieux. Si c’est comme ça, c’est sûr : on laisse tomber ! »

Mais parfois, il me dit « Ah, mais c’est vous le médecin, je vous laisse décider ! »

C’est ce que m’avait dit Bob « It’s up to you ! ». C’était il y a deux ans et comme il avait 58 ans, à cette époque je lui ai répondu « Let’s go. »

Et les PSA sont revenues à 6 avec seulement 6% de PSA libres. Et merde.

Quand la bouteille est ouverte, il faut la boire. Bob est allé voir un urologue qui a été lui piquer dans sa prostate.

Le laboratoire a répondu que ça n’avait pas l’air bien méchant. L’urologue a conclu qu’on surveillerait les PSA dans 6 mois et que, si elles augmentaient, on retournerait piquer un coup.

J’ai eu les résultats du contrôle la semaine dernière : 0,61. Waow !

Et j’ai vu Bob deux jours après, avec son épouse.

– Au fait, docteur, vous vous rappelez l’automne dernier quand j’avais fait la prise de sang et que les PSA étaient anormales ?

– Oui, oui.

– Vous ne vous en rappelez peut-être pas mais, deux jours avant, j’avais vu le gastro-entérologue pour mes hémorroïdes. Il m’avait fait un toucher rectal et avait été regarder. Vous ne pensez pas qu’il peut y avoir un rapport ?

– Euuuuuuuuh… si.

Mais kelcon, mais kelcon, mais kelcon !

Bien sûr qu’il y a un rapport ! La pauvre prostate, si on va la titiller de trop, même indirectement, ça fait monter les PSA pendant quelques temps.

J’avais prévu le bilan biologique et la consultation chez le gastro des semaines avant, je n’avais pas pensé qu’il attendrait autant avant de faire la prise de sang et, après coup, je n’avais plus fait le rapprochement.

Je me suis excusé auprès de mon patient de lui avoir fait subir inutilement des examens pas très rigolos. Il m’a dit que ce n’était vraiment pas bien grave et que c’était mieux dans ce sens « Better safe than sorry ! » et je me suis juré qu’on ne m’y reprendrait plus.

Enfin… j’espère.

Post-face

(Au début, ça devait être un post-scriptum, mais vu la tartine…)

Les « PSA » sont des protéines issues de la prostate que l’on peut doser dans le sang. Elles peuvent augmenter dans diverses situations : infection urinaire, calcul urinaire, « grosse prostate » des hommes âgés, cancer…

On considère le plus souvent que c’est anormal au-dessus de 4 ng/ml.

On peut aussi doser les « PSA libres ». Au-dessus de 25%, c’est rassurant (et en-dessous, ce n’est pas forcément inquiétant… c’est compliqué, hein).

L’intérêt de doser les PSA pour rechercher des cancers de la prostate avec l’idée de « Plus tôt on détecte, mieux c’est, plus on a de chances de guérir le patient » est très controversé. Il y a de bonne chances qu’en allant ainsi « à la pêche », on fasse plus de dégâts qu’autre chose.

Si on rajoute à ça, des « professionnels de la prostate » qui sont très agressifs et qui font un lobbying très insistant, des enjeux financiers massifs, la peur grandissante des risques judiciaires dans le domaine de la santé, des associations de médecins ou de patients qui tirent dans tous les sens, c’est assez explosif.

Je reviendrai d’ailleurs sur la question dans mon prochain billet.

Le problème, c’est que, tant pour les médecins que pour les patients, il est parfois beaucoup plus difficile d’assumer les conséquences d’un non-acte que celles d’un acte.

« Better safe than sorry ! » m’a dit Bob. Je l’ai laissé dire car je m’étais déjà excusé, j’avais dit combien j’étais désolé qu’il ait eu des examens inutiles et je n’allais pas me flageller davantage au prix d’explications complexes.

Mais ça peut être complètement faux.

Vu que pas loin de la moitié des hommes de 60 ans ONT des cellules cancéreuses dans la prostate (ce qui NE VEUT PAS DIRE qu’ils ont un cancer de la prostate), avec un peu de malchance, le laboratoire aurait trouvé l’une ou l’autre cellule cancéreuse dans les biopsies de mon patient.

Et là, scénario catastrophe : opération, rayons, hormones avec, au final, un Bob qui pouvait très bien se retrouver impuissant, incontinent et avec des brûlures chroniques du rectum. Super… Et tout ça avec une belle connerie comme point de départ.

Mais, Bob, avec tous les messages dont on est imprégnés et qu’on nous rabâche, il serait venu le sourire aux lèvres et la protection dans le slip, me serrer chaleureusement la main et me dire que ce n’était pas marrant tous les jours mais que merci de l’avoir sauvé à temps de cette horrible maladie.

Le vent du boulet n’est pas passé si loin que ça.

Pas de moi. De lui.

La loi de Borée

Il n’y a pas de raisons, moi aussi je veux laisser mon nom à la postérité médicale.

C’est pourquoi j’ai décidé de décrire un concept syndromique qu’il conviendra donc de désigner dorénavant par l’intitulé « Loi de Borée ».

En voici l’énoncé :

Pour tout patient, de préférence une femme de plus de 50 ans (critères non limitatifs), le degré d’attachement aux médications inutiles, voire dangereuses, (Tanakan©, Vastarel©, phlébotoniques, …) est strictement proportionnel à la probabilité de développer des intolérances, des effets indésirables et des « allergies » en lien avec les traitements les plus utiles et les mieux éprouvés sur le plan scientifique.

Passe-moi le sel

Je suis régulièrement effaré de voir passer sur une même ordonnance des antihypertenseurs, et en particulier des diurétiques, et des formes de Paracétamol effervescentes.

Les besoins physiologiques en sel sont d’environ 3 grammes par jour.

Le Français moyen ingère environ 10 grammes par jour et 20 % des personnes ingèrent plus de 12 grammes par jour (rapport INSERM).

L’OMS recommande de ne pas dépasser 5 grammes par jour. La plupart des recommandations considèrent comme acceptable une consommation de 6 à 8 grammes chez un adulte en bonne santé.

La limite de 5 à 6 grammes est le plus souvent fortement recommandée chez un patient hypertendu.

Bon, et qu’en est-il des comprimés effervescents en question ? Le service Pharmacie du Centre Hospitalier de Béthune a fait une excellente synthèse.

Doliprane 1g effervescent =1,0 g de sel / comprimé

Efferalgan 1g effervescent = 1,4 g de sel / comprimé

Efferalgan 500mg effervescent = 1,0 g de sel / comprimé

Pour rappel : 1 g de sodium = 2,5 g de « sel » (alias chlorure de sodium, NaCl)

Le petit papi qui prend gentiment ses 3 fois 2 comprimés d’Efferalgan 500 par jour (un grand classique), il est déjà à 6 g de sel par jour et il n’a pas encore commencé à manger !

Ça vaut bien le coup de lui mettre de l’Hydrochlorthiazide ou du Furosémide…

In God we trust (ter)

« Miroir, mon beau miroir… » est une intéressante étude qui vient d’être publiée par le « Commonwealth Fund ». Il s’agit de l’actualisation 2010 de l’étude régulièrement menée et visant à comparer le système de soins des Etats-Unis à d’autres références internationales.

Le Commonwealth Fund est une fondation privée, créée en 1918 et siégeant à New-York, qui vise à l’amélioration des systèmes de santé aux Etats-Unis et dans les autres pays industrialisés.

Cette étude a comparé les systèmes de sept pays de l’OCDE. Avec une forte tonalité anglo-saxonne puisque les deux seuls pays non anglophones qui y figurent sont l’Allemagne et, pour la première fois, les Pays-Bas.

A la stupéfaction générale, les Etats-Unis arrivent… derniers des sept pays comparés.

En fait, ça n’a évidemment rien d’étonnant.

Plus précisément, ça ne surprendra pas grand monde que les Etats-Unis figurent à la dernière place en ce qui concerne les aspects de coût, d’accessibilité ou d’équité.

Mais ce qui est frappant, c’est qu’ils sont également derniers (ou avant-derniers) pour ce qui concerne la sûreté du système de soins, sa coordination et la qualité globale des soins. Par exemple, ils sont derniers pour des items tels que les erreurs de posologie médicamenteuse, le délai de notification de résultats anormaux, les pertes de temps dues à des défauts d’organisation, …

Ils sont également en queue de peloton pour l’espérance de vie et l’espérance de vie en bonne santé.

Et, en parallèle, leur système de soins coûte presque deux fois plus cher par personne que le deuxième au classement (le Canada) et trois fois plus cher que la Nouvelle-Zélande. Ce qui permet de conclure une nouvelle fois, qu’en terme de système de soins, décidément, il y a (nettement) pire mais que c’est (beaucoup) plus cher !

Quant aux deux pays qui finissent en tête du classement, il s’agit des Pays-Bas et du Royaume-Uni.

On peut remarquer qu’ils figurent presque partout aux deux premières places sauf pour le critère « système de soins centré sur le patient ». Ils arrivent bons derniers sur des critères tels que l’information délivrée aux patients ou la prise en compte de leurs préférences. Peut-être est-ce une autre manière de dire qu’ils privilégient des considérations de santé publique au détriment des considérations individuelles.

L’étude souligne par ailleurs une idée fausse communément répandue. Les délais d’accès aux spécialistes sont généralement longs dans certains pays comme le Royaume-Uni et le Canada, ce qui est généralement attribué au fait qu’il s’agit de systèmes fortement socialisés avec peu de participation financière des patients. Or c’est également le cas aux Pas-Bas et en Allemagne avec, pour ces deux pays, des délais d’attente faibles.

Quant au critère d’espérance de vie totale et de vie en bonne santé, c’est personnellement celui que je trouve le plus discutable. De nombreuses données démontrent qu’il s’agit d’un critère qui n’est que partiellement dépendant du système de soins. Beaucoup d’autres facteurs viennent impacter ces éléments : conditions économiques, habitudes alimentaires, politiques familiales, éducation, législation du travail, … C’est d’ailleurs un point que soulignent les auteurs eux-mêmes.

Vivement la prochaine édition en croisant les doigts pour que la France y figure. Quelque chose me dit qu’on risque bien d’être assez déçus de notre « meilleur système de santé du monde ».

Expectative

Je n’aime pas l’homéopathie et les homéopathes.

Oh, ils ne sont pas bien dangereux. Il faut leur laisser ça.

On pourrait même, comme pour la psychanalyse, défendre l’homéopathie comme un joyau de l’exception culturelle française. Hop ! Hahnemann et Freud entre le Beaujolais nouveau, Emmanuelle Béart et le croissant pur beurre.

Eh oui, il n’y a quasiment qu’en France que l’homéopathie a un tel droit de cité. Et c’est probablement le seul pays dont le système de Santé publique rembourse les petits granulés.

Alors, certes, elle ne repose sur aucun fondement scientifique sérieux. Rien ne permet d’expliquer son hypothétique mode de fonctionnement. Et il n’y a pas davantage d’études démontrant une efficacité spécifique au-delà de l’effet placebo.

Mais je ne vais pas rentrer dans ces débats qui rempliraient des pages et des pages et prêteraient à des controverses sans fin. Parce que, en fait, ce qui me pose problème dans l’homéopathie, ce ne sont pas ses spécificités.

Ce que je n’aime pas, c’est ce qu’elle a de commun avec l’allopathie.

Ce qui vraiment me hérisse le poil, c’est que, homéopathie ou allopathie, on reste dans cette satanée singularité française : un problème, une consultation, une ordonnance, un médicament.

Et quand je dis « un »…

On est triste, une gélule rouge.

On dort mal, un comprimé bleu.

On a le rhume, une cuillère de sirop vert.

On s’est fait un hématome, un coup de crème jaune.

On a mal au dos, des petits granulés blancs.

Pourquoi ? Pourquoi faut-il que 90% des consultations françaises se terminent par une prescription médicamenteuse quand ce n’est le cas que de 43% des consultations en Hollande ? Et, bien évidemment, sans aucune différence notable en termes de mortalité ou d’état de santé globale.

Pourquoi n’est-on pas capables de dire et d’entendre que, dans bien des situations, la nature n’est pas trop mal faite et que les choses vont rentrer dans l’ordre d’elles-mêmes quoi qu’on fasse. Ou que beaucoup de problèmes pourraient avantageusement se régler avec quelques modifications de l’alimentation ou des habitudes de vie. Un rhume ? Une semaine avec les médicaments, sept jours sans…

Fut une époque où les médecins pratiquaient « l’expectative ». Il leur arrivait de considérer que le moment n’était pas propice à leur intervention et que le mieux qu’ils pouvaient faire était de laisser les choses évoluer et de revenir voir le malade le lendemain.

Et cette attitude était considérée comme un authentique acte médical.

Ils n’avaient pas les moyens dont nous disposons actuellement, certes. Mais je crains que, précisément, la surabondance de nos techniques modernes ne soit le principal facteur de l’hypermédicalisation de nos vies.

A force de dire que la médecine pouvait tout soigner, on a fini par lui demander de soigner tout.

Voilà, chers amis homéopathes, pourquoi je vous en veux. Parce que, en vous étant arrêtés au milieu du gué, vous participez à cette escroquerie.

Lorsque vous expliquez que les médicaments « chimiques » ne sont pas toujours nécessaires et qu’ils font parfois plus de mal que de bien, vous avez parfaitement raison. Lorsque vous privilégiez des consultations longues et que vous accordez une écoute prolongée à vos patients – quand la consultation moyenne d’un généraliste ne dépasse pas 14 minutes -, vous faites bien.

Mais, pas plus que moi, vous ne savez « soigner » un rhume ou un hématome.

Et lorsque, invariablement, vous concluez vos consultations par des ordonnances à rallonge et que vos patients se retrouvent avec des valises pleines de petits granulés blancs, vous ne valez pas mieux que nous autres, « allopathes ».

Des deux pieds, vous sautez nous rejoindre dans le péché de l’hyperprescription.

Sans même avoir l’excuse de la rigueur scientifique. Ou, au moins, son ambition.

« Le grand problème de la production capitaliste n’est plus de trouver des producteurs et de décupler leurs forces mais de découvrir des consommateurs, d’exciter leurs appétits et de leurs créer des besoins factices. »

Paul Lafargue  – Le Droit à la Paresse – 1880 (on a bien avancé…)

Edition du 30/08/2011

L’amie Camomille m’a offert un dessin pour illustrer ce billet :