Cadeau

Aujourd’hui, je me suis pacsé. Chez le notaire. Et samedi ce sera la grande fête.

Je n’avais pas l’intention d’en parler sur ce blog auquel je veux conserver son aspect strictement médical.

Mais il se trouve que j’ai un homme extraordinaire.

Il m’a offert hier soir un cadeau superbe et inattendu : le recueil de l’ensemble de mes billets de 2010  édités  sous la forme d’un petit livre tiré à 40 exemplaires.

Déjà ça, ce serait un joli cadeau.

Mais il y a tous les bonus merveilleux qu’il s’est donné  du mal pour regrouper. Et que d’autres se sont donné du mal à écrire et dessiner.

Martin Winckler en personne m’honore d’une préface.  – Attendez, je répète… – Martin Winckler a écrit une préface rien que pour moi !!!!!

Et plusieurs dessinateurs que nous admirons ont bien voulu illustrer mes billets. Vraiment, merci à  tous pour ce cadeau extraordinaire.

Il me reste à vous le faire partager.

La couverture est illustrée par l’ami Yann Wehrling. Merci pour ce très joli cadeau de Pacs. Une belle célébration pour presque 20 ans d’amitié :

Ensuite la préface de Maître Winckler :

« Vraiment moins seul

Soigner, c’est pas de la tarte.

D’abord, il faut écouter les autres nous raconter leur vie. En morceaux. Par bribes. Ce qu’ils veulent bien nous en raconter. Et ça n’est pas facile de dire qui on est. Soigner, c’est un travail d’interprète. La musique, c’est le chant des patients.

Et puis, il faut les regarder. Enfin, regarder ce qu’ils veulent bien nous montrer. Et c’est pas facile de se mettre à poil devant un étranger. Soigner, c’est un travail de photographe. Les paysages, c’est le corps des patients.

Après, il faut répondre aux questions. Explicites ou implicites. Et donc, parfois, deviner. Soigner, c’est un travail de détective. Le mystère, souvent, même le patient ne le connaît pas.

Autant dire que ça ne se fait pas comme ça.

C’est long, c’est lent, on avance dans le brouillard et on trébuche sans cesse alors qu’on est censé tenir la lampe.

Eh bien, ce boulot pas simple, il y a des gens qui le choisissent. Et, qui plus est, qui choisissent de faire ce qu’il y a de plus difficile :non seulement ils vont soigner, mais ils vont vivre au milieu des gens qu’ils soignent. Dans un village. Et leur adresse est la même que celle de tout le monde : « Le Bourg ».

Ils sont fous, ou quoi, ces types-là (ici, le mot « type » est un terme générique non sexiste. Comme en anglais le mot « guy », qui s’applique aussi bien aux femmes qu’aux hommes) ?

Qu’est-ce qui leur prend de vivre la vie des gens, au beau milieu d’eux, et de se mettre à écouter toutes leurs misères ? Qu’est-ce qui leur prend de s’exposer de plein fouet aux injustices, aux abus de pouvoir, au mépris que les habitants du Bourg, peu ou prou, subissent – et particulièrement quand ils sont malades – de la part de leur famille, de leur médecin maltraitant, de leur maison de retraite, de l’administration ? Qu’est-ce qui leur prend de vouloir jouer les redresseurs de torts avec les enfants qu’on ne veut pas vacciner et les prescripteurs de chat aux vieillards qui souffrent ? Ils sont fous, ou quoi ?

Là, la réponse est délicate. Peut-être. Et peut-être pas.

Et la question qui vient ensuite c’est : « Et d’ailleurs, s’ils sont pas fous comment font-ils pour tenir le coup ? »

Et là, la réponse est simple. Ils écrivent. Jaddo, Scarabée la Carabine, le Fils du Dr Sachs, Borée. Ils écrivent et ils donnent à lire.

Ah oui ? Mais ça sert à quoi, d’écrire ? Ça change rien à la vie des gens, ça fait pas avancer le schmilblic. C’est juste un peu de masturbation intellectuelle pour celui ou celle qui le fait. Et pour un qui a la chance de se faire publier un jour, combien y en-a-t-il qui restent dans le silence à accumuler les carnets noircis ?

Oui, certes. On peut voir les choses comme ça. Mais quand même. « A quoi ça sert d’écrire ? » Mmmhh. Ça sert. C’est pas facile de dire à quoi, exactement, parce que ça sert à beaucoup de choses. Et d’abord, à tenir le coup. À ne pas y rester, dans le silence. Parce que, même si on n’est pas beaucoup lu, on est lu, quand même. Surtout aujourd’hui, avec les blogs. Il n’y avait pas de blog, en 1992 quand j’écrivais mon bouquin. Et encore moins en 1983, quand j’exerçais dans le Bourg. J’écrivais sur des cahiers (pour l’ordinateur, il m’a fallu attendre cinq ans). Et je le tapais à la machine moi-même ensuite. Je donnais des trucs à taper (de la doc pour les patients) à ma secrétaire, mais je n’aurais jamais osé lui faire lire ce que j’écrivais sur les patients. Question de discrétion, vous comprenez.

La beauté du blog, c’est que c’est un cahier accessible à toutes et à tous, en toute discrétion. Un cahier dans lequel on peut exploser.

« Ah, oui, c’est ça, ça défoule. Et alors ? A quoi bon ? »

Je n’ai pas de réponse à ça, parce que ça dépend des situations. On sait à peu près à quoi ça sert pour soi : on n’est pas pareil quand on peut écrire, quand on peut maîtriser un semblant de petit peu ce qu’on a vu ou ressenti. On se sent moins… plus… Enfin, on se sent et on tolère de se sentir. On arrive à se sentir, et à se regarder dans la glace le matin. Et, parfois, on voit que ça sert aussi à quelqu’un d’autre. Aux habitants du Bourg, bien sûr, qui ne nous regardent plus de la même manière quand ils voient qu’on les regarde autrement, qu’on subit moins vivement leur malheur. Qu’on est plus présent, moins à vif, plus rassurant. Parce qu’écrire, au fond, ça nous rassure. Entre autres bienfaits. Et ils le sentent, même s’ils ne nous lisent pas.

Et puis, ça sert aux autres folles, aux autres fous. Si, si, je vous assure. D’ailleurs, Borée, le Fils du Dr Sachs, Jaddo, Scarabée la Carabine, je suis sûr qu’ils s’entrelisent, ça leur permet de pas s’enliser, ça leur fait du bien. Ils se sentent moins seuls, vraiment moins seuls. Et ça, c’est vraiment pas rien.

Je me souviens du jour où je me suis senti vraiment moins seul.

J’étais assis à une table de librairie derrière une pile de bouquins. C’était un roman. Il racontait sensiblement les mêmes choses que le blog de Borée. Il venait de sortir, quelques semaines plus tôt. Personne n’en avait entendu parler, ou presque. Enfin, si, il y avait eu  cinq minutes à France Inter, au journal, quinze jours plus tôt.

Bref, je signais aux deux ou trois copains qui étaient venus (la librairie se trouvait en ville, pas loin du Bourg où j’avais exercé) et je vois entrer trois personnes. Une jeune femme d’une trentaine d’années et un couple qui avait l’air d’être ses parents. Elle vient vers moi, souriante, elle me tend un bouquin tout fatigué, un bouquin identique à ceux de la pile, et elle me dit : « Je l’ai déjà lu, je vous ai entendu à la radio pendant que je faisais une visite à domicile, je suis allé l’acheter et je l’ai lu tout de suite. Voulez-vous me le signer ? »

Ravi (bien sûr), je me mets à écrire de ma belle plume sur la page de garde du bouquin et je la vois qui en prend un autre et qui attend. Quand j’ai terminé, elle me tend le deuxième bouquin et elle dit : « Celui-ci, c’est pour mes parents. Je leur ai prêté le mien mais je tiens à ce qu’ils aient le leur. »

Je me penche sur le deuxième volume, et je l’entends faire un petit bruit d’inspiration, comme les gens du Bourg qui, juste avant de se lever, hésitent à dire la chose qu’ils retiennent depuis qu’ils sont entrés. Je lève la tête.

« … Je peux vous raconter quelque chose ? »

Je lui fais un sourire grand format et avant que j’aie pu ouvrir la bouche, bien sûr, elle se lance :

« J’étais interne, je me spécialisais. On m’a proposé des remplacements dans le cabinet privé d’un des assistants du service. Et la première fois que j’ai fait un remplacement, je me suis dit : ‘Je ne veux pas faire ça. Je ne veux pas voir des gens qui se ressemblent tous entrer pour me parler toujours des mêmes problèmes. Je vais étouffer. Je vais mourir.’ Alors, j’ai décidé de faire de la médecine générale. Mes parents (elle se tourne vers eux) n’ont pas compris. Ils pensaient que j’allais être spécialiste et avoir un beau bureau en ville ou à l’hôpital, que je finirais mes consultations le soir, que je ne serais jamais obligée de travailler le dimanche et les jours fériés. Ils m’ont dit ‘C’est vraiment ça que tu veux, ma fille, vivre au milieu des gens, aller les voir chez eux, entrer dans leur cuisine et leur chambre à coucher, les recevoir à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit ?’ Et j’ai répondu ‘Oui, c’est ça que je veux.’ Et bien sûr, ils ne comprenaient pas. »

Et là, elle regarde sa mère qui, en souriant, me dit : « C’est vrai, je ne comprenais pas. Et puis, il y a quelques jours (elle désigne le bouquin) elle m’a fait lire le Blog de Borée, et j’ai compris. »

Quoi ? Un lapsus calami? Pas du tout!

Un bouquin, un blog, c’est pareil.

C’est pas la forme, ni la date, ni même l’auteur qui compte.

C’est le cœur.

Martin Winckler »

Voici enfin, dans l’ordre, les dessins illustrant des billets :

Mon amie Gélule a illustré le billet « Ça glisse, Alice ! ». Rien d’étonnant de la part d’une autre militante d’une médecine moderne et respectueuse des femmes.

La dessinatrice professionnelle, Laurel, m’a carrément gratifié de deux dessins pour illustrer les aventures de René  dans « Chacun cherche… » et dans « Décalage ».

Derek a illustré  « Y’a pas de miracles (contrepoint) ». Merci, vraiment. J’espère, autant pour moi que pour tous les internautes, que tu retrouveras du temps pour ton blog.

Camomille a choisi d’illustrer « Expectative ». C’est vraiment très gentil de ta part. Allez visiter son blog dont j’adore l’ambiance pharmaceutico-poético-geek !

Maître Boulet a pris sa plume pour « Tous les chemins mènent au Blog ». Quel honneur ! Je sais que je vais faire bien des jaloux(ses).

Et, last but not least, David Gilson a accepté  d’illustrer « Venez donc avec ! ». Je ne crois pas que ce soit rabaisser les autres de dire que j’ai une affection toute particulière pour ce dessin, tant à cause de l’histoire que du contexte. Ce dessin tendre et drôle restera certainement gravé comme le symbole de cette étape de ma vie.

Voilà. Encore merci à tous. Je sais combien le temps est rare et précieux. Merci à tous ces artistes de nous en avoir offert avec talent.

Merci surtout, au final, à  mon homme. Je t’aime.

37 réflexions sur « Cadeau »

  1. Isatis

    Superbe cadeau s’il en est !
    Félicitations à tous les deux, bonne route 😉

    (HAN sur mon blog j’ai des commentaires d’un médecin préfacé par MARTIN WINCKLER. Huhu. ^^)

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  2. Ultima

    Et vos lecteurs aux anges ! J’avoue une petite pointe de jalousie : Winckler himself, Derek qui sort de son silence rien que pour vous (bisou, Derek!), des dessins somptueux… Merci de nous faire partager votre bonheur, merci

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  3. Mareties

    40 exemplaires ! Nous allons nous battre dans la seule librairie qui va le vendre alors ? 🙂

    Très longue et belle route à vous deux.

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  4. Koa

    Je suis super émue par ce billet, émue par le long texte de Grand Maître Martin, émue par tes mots, émue par ce que j’imagine de temps, d’énergie et d’amour dans ce cadeau, émue de te savoir si bien accompagné (et sans aucun doute, si bien accompagnant), émue par l’émotion qui transpire…
    Waouh.
    Bon chemin à vous deux..

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  5. Opale

    Oh c’est magnifique ce cadeau, j’ai les larmes aux yeux rien qu’en imaginant ton émotion et aussi son émotion à lui quand il le préparait et quand il te l’offrait !
    C’est superbe !
    La préface est très très belle, elle donne envie d’être médecin généraliste, vraiment , tant ça décrit bien la beauté de votre métier , son intérêt pour l’humain.
    Et les dessins, superbes, j’ai aussi ma préférence pour le dernier où vous êtes très mimi tous les deux 😉
    Plein plein de bonheur !!!!

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  6. Selina

    Merci d’avoir partagé ce grand moment d’émotion avec nous. Que dire ? Sinon que c’est beau 😀

    Ah si, j’ose rajouter aux mots de Martin Winckler (que je kiffe) que vous êtes lu par des gens qui ne sont pas des soignants – j’en fais partie – et que ça leur fait beaucoup, beaucoup de bien.

    Tous mes voeux de bonheur !

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  7. Derek

    Non mais rêve, je reposterais plus jamais sur mon blog. Par contre je vous espionne tous en silence. Enfin presque.
    Bien content que tu sois touché à ce point, t’a vraiment un super copain. J’avais pas vu la préface et elle est vraiment chouette, et moi aussi c’est le dernier dessin mon préféré, autant pour la note associée que pour le dessin en lui même.
    Allez encore une fois : Félicitations !

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  8. Candice

    De tout coeur je vous envoie à toi et ton compagnon mes affectueuses pensées. Et merci à toi Borée, tu nous honores de parler ainsi dans ton blog de notre métier et des gens que nous soignons. Je vous embrasse et vous souhaite beaucoup de bonheur à deux.

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  9. DocVéro

    Tout d’abord, recevez cher Borée toutes mes félicitations pour votre pacsage : que du bonheur à venir, je vous souhaite à tous les deux!
    Très émue aussi que vous nous racontiez et fassiez partager votre cadeau (et quel cadeau!!!)
    Continuez…
    DocVéro qui vous lit depuis ses remplacements

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  10. Nane

    Je suis une lectrice sous marin mais là un petit tour en surface s’impose pour des félicitations! Quel beau cadeau, quelle preuve d’amour! Je vous souhaite à tous les 2 une longue vie de bonheur!

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  11. L'apprenti Docteur

    Eh bien y’en a qui se mouchent pas du pied ! :p

    Une belle panoplie d’artistes pour ce recueil, mais surtout un cadeau magnifique et hors du commun !

    Félicitations à vous deux,et fêtez bien votre union alors!

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  12. Alia

    Félicitations pour cette union.
    Quel cadeau magnifique! Carrément une préface de Martin Winckler…rien que cela…et tous ces dessins…Vous faites des envieux, c’est certain 😉

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  13. docteursachs

    Magique la préface!
    Géniales les illustrations!
    Grandiose le chéri!
    (il a pas un petit frère?)

    Encore toutes mes félicitations et tous mes vœux de bonheur!

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  14. wain"

    Félicitations et tous mes voeux de bonheur !
    que d’émotions et d’attention(s) dans ce cadeau unique, qui a de quoi faire envie à plus d’un, soignant ou non, écrivain ou non, mais lecteur ici certainement 🙂 !

    (ce qui est bien avec ce billet, c’est qu’en plus il va être en lui même un collector de commentaires ce qui se fait de mieux en bloggers … à conserver précieusement pr une édition révisée … )

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  15. Emmanuelle

    Une préface de Martin WInckler? Hou, comme je suis jalouse! Mais si contente pour vous, vous le méritez.
    Tout cela a l’air MAGNIFIQUE,superbe cadeau, merci de nous en faire profiter, c’est vraiment gentil de votre part.
    Tous mes vœux de bonheur.

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  16. Hécube

    Je vous souhaite de poursuivre la route heureuse que vous avez prise ensemble.
    Je ne suis pas médecin, mais (rarement) patiente, et mère de 3 vikings (le viking n’est pas patient, même dans un cabinet médical).
    Je suis patiente et vos blogs (le votre, Borée, celui de Jaddo, de Derek, de Martin Winckler, de Camomille, etc) m’ont réconciliée avec la médecine et ceux qui la pratiquent.
    Merci donc à tous de partager ces moments de votre vie et vos précieuses connaissances avec vos lecteurs.
    Le cadeau de votre amoureux est une idée magnifique.

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  17. docausol

    Félicitation et meilleurs voeux de bonheur.
    Merci beaucoup d’avoir eu le coeur et le courage de partager sur ce blog cette tranche d’intimité. Le cadeau est somptueux et le billet extrement touchant.
    Encore une fois, beaucoup de bonheur à deux

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  18. Taline

    La préface de Martin Winkler a répondu exactement aux questions que je me posais hier dans la rue après avoir navigué plusieurs heures sur vos merveilleux blogs, le tien et aussi celui de tes amis de banières. Sur le blog et sur ce qui vous faisait survivre.

    Bravo aussi aux dessinateurs.

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  19. Casper

    Ce matin, au réveil; une magistrate tuée près de chez elle. La journée commence mal.

    Et puis, j’allume internet, je fais le tour de mes blogs favoris, et je tombe sur votre article.

    Et maintenant, tout me parait bien.
    Merci pour votre blog, pour ces petits moments intimes que vous nous faites partager.

    Et surtout félicitations 😉

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  20. Lore

    Félicitations pour ce pacs!
    Et effectivement ton homme est génial: quel beau cadeau, quelle belle attention! Rhha c’est le genre de cadeau qui me ferait rester sur mon petit nuage pendant des semaines…
    Martin Winckler est royal aussi ainsi que tous les bloggeurs dessinateurs qui ont aidé ton chéri à faire ce petit bijou!

    Savoure ce moment (que tu as eu la gentillesse de nous faire partager) et tous les moments de bonheur que vous allez avoir encore ensemble.

    Bises

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  21. José Lemaire

    Y a pas à dire : c’ est grand, c’ est beau, c’ est généreux.

    Il est rassurant de constater qu’ il existe encore des îlots de profonde humanité dans ce monde de brutes.

    Rien que du bon pour vous deux !

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  22. mebahel

    toutes mes félicitations et vœux de bonheur (ça vaut pour le post qui suit, d’ailleurs 🙂 )
    Et votre blog est d’intérêt public, même (surtout?) pour les non soignant-e-s.

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