Archives mensuelles : août 2012

Mon cabinet idéal

Comme tout le monde, j’ai commencé par faire des remplacements.

De cabinet en cabinet, je trouvais des trucs sympas et pratiques et d’autres où je me disais « jamais ça ! »

Bien sûr, dans aucun de ces cabinets je n’ai trouvé tout ce qui me plaisait (mais parfois, je ne trouvais rien). Petit à petit, je me suis donc imaginé mon « cabinet idéal », là où je serai à l’aise pour travailler dans de bonnes conditions. Et quand l’envie d’être « chez moi » est devenue plus grande que les avantages du statut de remplaçant, je me suis installé.

Je vais donc partager avec vous quelques uns de ces petits trucs glanés au long de mon parcours.

Si vous voulez bien vous donner la peine d’entrer…

1. La table d’examen

Evidemment, j’ai choisi une table sur roulette et à hauteur variable : tellement plus confortable pour les patients… et pour mes vertèbres.

Surtout, je l’ai prise en largeur 80 cm. Ça me permet de m’asseoir à côté du patient, ou bien derrière lui, pour l’examiner confortablement, ou encore de poser mon matériel directement à côté. Et c’est beaucoup plus agréable pour les patients obèses.

Petit détail : j’ai demandé à ce que le rouleau de papier soit placé à la tête et non aux pieds comme c’est le plus fréquent. En effet, aucun problème à glisser le drap froissé par la tête d’un patient sous les pieds du suivant mais l’inverse n’est guère possible. Donc, plutôt que de changer des longueurs entières, je déroule le papier petit à petit. Grosses économies de consommables (et sachez que les consommables médicaux sont scandaleusement chers).

Promotal Quest(Nouvelle génération du « Promotal Quest » qui, par contre, n’existe plus qu’en 65 ou 75 cm – environ 2 500 €)

 2. Pour y voir clair

Combien ? Combien de fois ai-je pesté contre des éclairages insuffisants ou mal fichus ? Contre des lampes montées sur des roulettes qui venaient systématiquement me traîner dans les pieds ? C’était décidé, j’aurai un scialitique accroché au plafond pour éclairer puissamment ce que j’ai sous les yeux et sans que ça m’encombre.

Halux iris(Scialitique Halux iris, version plafonnier – environ 1 500 €)

 3. La gorge et les oreilles

Y voir clair… Le souci avec les otoscopes portatifs, c’est que, généralement, on se décide à changer les piles quand on n’y voit vraiment plus rien.

J’avais donc découvert ce dispositif mural branché sur secteur : la garantie d’avoir toujours une lumière pleine puissance.

Station murale Heine(Station murale Heine EN 100 – environ 750 € l’ensemble sans la lampe à fente que je n’ai pas)

4. Les petits

Je suis particulièrement fier de ma table d’examen pour bébés. Ça, je ne l’ai vu nulle part, c’est moi qui l’ai bricolée.

A noter que dans mon nouveau cabinet, j’ai installé une « rôtissoire » pour qu’ils aient bien chaud quand il fait frais. A tester l’hiver prochain.

5. Le lavage des mains

J’ai tout connu : les savonnettes grises, les torchons de la même couleur ou carrément l’absence de point d’eau dans la salle d’examen.

Et puis, bien sûr, les bons robinets classiques avec poignée. Comme ça, quand on vient d’examiner des pieds qui puent, on hésite bien avant de se décider « Merde, je vais dégueulasser les poignées, il n’y a pas d’autre solution ? Ben, non, il n’y a pas d’autre solution… »

J’ai opté pour un mitigeur à commande infrarouge et, bien sûr, un distributeur de savon liquide (il avait une commande au coude qui m’a lâché lors du déménagement et le modèle ne se fait plus).

Et puis aussi un évier carré à fond plat, c’est quand même plus pratique quand on a du matériel à laver.

(Mitigeur Grohe Europlus E – environ 680 €)

 6. La stérilisation

Vous le savez, dans mon coin de brousse, j’ai souvent affaire à diverses plaies, brûlures, échardes… Pour les sutures, j’utilise bien sûr des kits à usage unique (c’est une obligation légale, en tout cas pour appliquer la cotation officielle).

Il existe, certes, du matériel à usage unique mais il est souvent de moins bonne qualité et, vu la diversité des instruments, les stocks seraient compliqués à gérer.

J’ai donc investi dans un autoclave type S.

(Autoclave Euronda E7 – environ 4 500 €)

 Je stérilise mon petit matériel sous sachet pré-scellé, c’est la seule manière d’être sûr de la stérilité jusqu’au moment de l’utilisation.

7. Qu’a fait Ikéa pour moi aujourd’hui ?

Ikéa m’a fait des meubles et des tiroirs parfaits pour satisfaire mes obsessions de rangement !

8. Les dossiers

Pour le dernier chapitre, on va sortir de ma salle d’examen.

Je ne sais pas comment ils font, tous ces confrères qui archivent leurs dossiers dans des micro pochettes cartonnées format demi ou tiers de A4. Des pochettes généralement compressées les unes contre les autres sans points de repères visibles. Des courriers qu’il faut s’échiner à plier et à déplier pour les classer ou les relire.

C’est dans le cabinet où j’ai mes meilleurs souvenirs de remplacement que j’ai réalisé que des dossiers suspendus avec des pochettes A4, c’était quand même infiniment plus pratique. Pas plus de 4 ou 5 pochettes par dossier suspendu histoire de trouver rapidement celui que l’on cherche.

Encore que ce soit plus pour ma secrétaire que pour moi puisque tout est informatisé et qu’en réalité, j’ai, pour ma part, rarement besoin d’y accéder.

Voilà, c’était un rapide petit tour de mon cabinet. Il y aurait encore des tas de choses à vous montrer mais elles sont beaucoup plus classiques.

Je n’ai regretté aucun de mes achats sauf la petite cuve de nettoyage à ultrasons qui ne tenait pas ses promesses et qui n’était finalement pas indispensable, mais elle ne m’a pas ruiné.

À ce sujet, vous aurez constaté que le matériel médical, pour peu que l’on exige une certaine qualité, coûte assez cher. Les gros équipements que j’ai présenté ici représentent déjà plus de 10 000 €. Au total, il faut compter, je pense, entre 20 et 30 000 €, selon ses besoins, pour équiper un cabinet de généraliste à neuf. Ramené à notre chiffre d’affaire, ça n’est cependant pas excessif.

Dernière chose : le titre de ce billet pourrait être trompeur.

Travailler à l’aise, dans de bonnes conditions matérielles et dans des locaux adaptés, c’est hyper important.

Cependant, pour que ce soit vraiment un « cabinet idéal », ça ne suffit pas : environnement professionnel, associés, secrétariat, localisation, autant de choses qui sont probablement encore plus cruciales, même si elles sont plus personnelles.

Mais c’est une autre histoire…

L’affaire des blouses d’hôpital

Les copains et copines blogueurs ont été à l’origine d’une chouette initiative.

Tout est parti du billet d’une blogueuse kiné, Leya-MK : « Dignité, mes fesses !« .

Farfadoc a enchaîné par un billet-manifeste : « Pour des chemises d’hôpital respectant la pudeur et la dignité des patients » (tout est dans le titre).

Elle invitait à signer une pétition.

Bien d’autres blogueuses et blogueurs ont relayé cet appel. Dr Couine a eu comme premier mérite de le faire en dessin et comme second mérite de recenser l’ensemble des billets qui s’étaient joint à ce mouvement.

Cet appel a été largement repris dans la presse, la pétition a fait parler d’elle et la Ministre de la Santé a annoncé qu’elle se saisissait du dossier.

J’arrive donc un peu après une bataille qui a eu comme seul défaut d’être lancée pendant mes vacances. Mais je souhaitais tout de même en parler ici et vous inviter à continuer à signer la pétition.

Si certains pourront trouver ce mouvement dérisoire par rapport à tous les enjeux de notre système de santé et à toutes les entorses à la dignité et au respect que l’on peut rencontrer à l’hôpital comme en ville, je reste un fervent défenseur de ces mouvements citoyens qui permettent d’avancer concrètement sur des dossiers précis. J’aime ces ruisseaux qui font les fleuves.

Cette histoire aura également été une nouvelle illustration du caractère « révolutionnaire » de la blogosphère et de sa capacité à peser sur les choses.

Toute mon amitié et mon plus profond respect à celles (essentiellement des filles pour le coup) qui ont contribué à cette initiative.

Ctrl + Z

Jane est venue me voir pour la première fois il y a quatre ans.

On peut dire qu’on a une relation complexe.

Elle est arrivée avec son dossier. On venait de lui enlever un sein.

Elle demeurait un peu loin du cabinet, dans un village aux limites du canton. Ma secrétaire lui avait dit qu’en principe je ne prenais aucun nouveau patient qui habitait là-bas.

Je m’occupais cependant déjà d’une de ses amies et de son frère, un bon gros nounours heureux de vivre. Elle m’a touché avec son histoire, je lui ai dit oui. Elle a pleuré.

Avant la retraite, elle dirigeait un centre de naturo-aromathérapie. Venir me voir, moi, cartésien et adepte de la médecine fondée sur les preuves ! Ce n’était pas gagné que nous réussirions à conjuguer nos points de vue.

Mais je crois que Jane a quand même conscience des limites de l’aromathérapie et que, contre son cancer, mieux vaut tout de même assurer ses arrières.

C’est ainsi que nous nous sommes apprivoisés, je la sentais bien souvent éclatée entre les convictions qui ont fait sa vie et la confiance qu’elle nous accorde, à moi et aux spécialistes.

Elle avait tout un tas d’effets indésirables, aussi diffus et imprécis que non répertoriés dans les notices. Pourtant, elle continuait, j’en suis certain, à suivre les prescriptions que je lui proposais.

Moi, perdu dans ma rationalité, j’avais du mal à m’y retrouver. Je tâchais de lui offrir une oreille attentive et de réduire les ordonnances à ce qui me semblait le strict minimum.

Petit à petit, les choses s’étaient apaisées.
J’ai vu Jane en août de l’an dernier. J’ai écrit dans son dossier : « Pense avoir remarqué une tuméfaction de la zone de cicatrice mammaire. À la palpation, je pense que ce n’est rien d’autre que l’extrémité d’une côte avec peut-être un peu d’arthrose. Mais du moment qu’elle pense avoir remarqué un changement => échographie. »

J’écris toujours beaucoup dans mes dossiers.

Elle est revenue me voir fin novembre. Je l’avais si bien rassurée qu’elle a mis trois mois pour faire l’échographie prescrite.

Celle-ci était assez inquiétante. Ce coup-ci, c’est moi qui ai pris le téléphone pour organiser une biopsie. Les résultats sont revenus positifs.

Saloperie.

J’ai relu ce que j’avais noté. Rien à redire. Je l’avais examinée. J’avais prescrit le bilan nécessaire. J’avais évité de l’alarmer inutilement.

Putain ! Je l’avais tellement bien rassurée qu’elle a mis trois mois à la faire son échographie.

Trois mois de perdus.

Et si j’avais utilisé d’autres mots ? Et si j’avais pris le rendez-vous moi-même ?

D’autres ont déjà écrit sur cette responsabilité qui est la nôtre, ce poids qui repose sur nous, les enjeux des décisions que nous prenons. Dans bien des cas, si nous nous trompons, les conséquences ne seront pas bien méchantes, mais parfois c’est vraiment une question de vie ou de mort. Au sens premier de ces mots.

Si j’avais agi autrement, est-ce que ça aurait changé quelque chose ? Probablement pas. Mais qui peut en être sûr ? Certes, vu le diagnostic, les études nous disent que quelques semaines de plus ou de moins, ça ne modifie rien. Mais ce ne sont que des statistiques.

Si mes paroles ou mon attitude avaient été différentes ce jour-là, est-ce que le destin de Jane aurait pris un autre embranchement ? Je ne le saurai jamais.

Le passé ne se réécrit pas. Nous ne pouvons que composer avec.

Et vivre avec nos remords.

Transpiration et endorphines

Petit billet vacancier en phase avec l’actualité olympique.

Il faut croire que le manque d’oxygène en altitude et les crampes dans mes mollets stimulent malgré tout mon inspiration.

C’est visiblement ce qui arrive quand les seuls muscles qu’on entraîne tout au long de l’année sont ceux des doigts sur le clavier et que l’on se retrouve en vacances avec un acharné des efforts sportifs !

Pour ceux qui ne connaissent pas Linda Lemay, commencez par vous mettre cet air en tête.

Ensuite, c’est par ici…

 

Lever 6 heures, le soleil dort,
Petites foulées pour le lancement.
Avec mon air de matador
Sans but précis, m’échauffer l’sang.
J’adore courir mais cette racine
Ne partageait pas le même avis.
Boiti-boitant, clopant-clopine,
Je rentre bander ma cheville.

J’aime le sport
Transpiration et endorphines
J’aime le sport
Mieux que le sexe, la cocaïne
J’aime le sport
Mes muscles, mes os j’les discipline
J’aime le sport

J’enfile mon bonnet, mes lunettes,
P’tit slip lycra et pattes rasées.
Je m’avance et puis je pique une tête,
Après la brasse, le dos crawlé.
J’adore nager mais c’est pas d’veine
De m’être fait bouffer quatre doigts.
L’Amazone juste après la Seine,
J’avais omis les piranhas.

J’aime le sport
Transpiration et endorphines
J’aime le sport
Mieux que le sexe, la cocaïne
J’aime le sport
Mes muscles, mes os j’les discipline
J’aime le sport

Maillot moulant sur mes tétons,
J’m’en vais me sculpter les mollets.
Vous allez voir mes p’tits pignons
Dans la montagne, j’vais vous soigner.
J’adore le vélo mais moins le mur
Où, r’descendant du Galibier,
J’me suis éclaté les fémurs
À la sortie d’une courbe serrée.

J’aime le sport
Transpiration et endorphines
J’aime le sport
Mieux que le sexe, la cocaïne,
J’aime le sport
Mes muscles, mes os j’les discipline
J’aime le sport

L’an prochain sans hésitation,
Si j’ai toujours deux jambes, deux bras,
Iron Man ou bien marathon,
Je m’en vais enchaîner les exploits.
Car c’est sur mon avant-dernier plâtre
Que l’on m’avait dédicacé,
Entre les sutures et les emplâtres,
Qu’le sport c’est bon pour la santé.

J’aime le sport
Transpiration et endorphines
J’aime le sport
Mieux que le sexe, la cocaïne,
J’aime le sport
Mes muscles, mes os j’les discipline
J’aime le sport